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Atelier d'écriture de l'écoute-s'il-pleut
4 mars 2020

Et dans le chemin…

Zabeth Stépan

 

nu_au_fauteuil_noir_1932_Pablo_Picasso

Moi aussi je le connais bien ce « chemin », mais à moi, il ne fait pas peur du tout. Au contraire, je me plais dans ce passage sombre, je m’y déplace en catimini. Souvent, lorsque je m’arrête devant son entrée, il me semble toujours que l’obscurité m’appelle, m’invite même. Parfois, je m’y aventure, il est assez facile de me cacher dans une des encoignures. Là, mon imagination échafaude des projets fort inavouables.

Je sais que bien peu de gens l’empruntent puisqu’il conduit dans une propriété privée. J’ai épié tous ceux qui se hâtent une fois quittée l’avenue Maréchal Foch. Certains flânent, d’autres s’arrêtent en soufflant, posant un moment leur panier de retour du marché. Les plus jeunes sautent d’une marche à l’autre en s’amusant. Mais lorsque la nuit tombe, l’atmosphère change ; ils l’empruntent rarement seuls et dans ce cas, ils se dépêchent.

Ont-ils peur ? Et de quoi ou bien de qui ? Ah ! C’est de moi qu’ils devraient se méfier, mais non, ils ne me connaissent pas et c’est dommage ! S’ils savaient… Des pulsions de violence, de meurtre même m’envahissent. Passer à l’acte, oui, il me semble qu’un plaisir intense m’étourdirait. Ce soir, je suis aux aguets, je suis prêt, alors, qui sera la victime ?

C’est alors que j’entends des talons claquer vivement sur le trottoir et la silhouette élancée de la fille de la maison passe près de moi sans me voir, tranquille, en téléphonant.

Doucement je la suis, mes semelles de crêpe ne font aucun bruit. Dans un coin plus sombre, je me retrouve brusquement derrière elle, contre elle ; sentant mon souffle haletant dans son cou, elle sursaute, affolée. Je plaque ma main sur sa bouche pour étouffer le cri qu’elle allait pousser. Mon sang bat dans ma poitrine, l’émotion m’oppresse, tout devient trouble. Je sens son corps tendu, crispé et ses gestes fous pour se dégager de mon étreinte, elle essaie désespérément de m’échapper. Impossible !

Mes bras la ceinturent. J’enfonce dans sa gorge le bâillon que j’avais préparé, et la retourne violemment vers moi. Ses yeux éperdus découvrent mon visage masqué tel un clown hideux et maléfique. Plaquée contre le mur rugueux, elle gémit douloureusement, je ne peux m’empêcher de la serrer contre moi. Un sentiment pervers m’envahit au contact de ses formes voluptueuses. Je suis fort, puissant, les battements désordonnés de son cœur et le tremblement de ses membres m’excitent au plus haut point.

Alors, mes mains, comme si elles ne m’appartenaient pas, emprisonnent son cou gracile et de toutes mes forces, je serre, je serre. Une peur indicible suinte de tout son être et la terreur emplit ses yeux exorbités. Petit à petit ses mouvements d’abord violents, anarchiques, perdent de la force, deviennent plus hésitants, je continue en épiant son visage qui s’empourpre. Enfin, son corps se relâche, s’amollit et s’affaisse lentement dans l’ombre du passage.

Soudain, ma tension retombe, hébété et muet, je regarde la fille immobile, figée, inerte, morte. Qu’est-ce que j’ai fait ? Qu’est-ce qui m’a pris ? Devant l’énormité de cet acte, j’arrache mon masque qui tombe à terre et je m’enfuis, redescends le chemin à toutes jambes. Je ne me calme qu’une fois arrivé dans la rue heureusement déserte. Au fur et à mesure de mon avancée, je reprends une marche normale sans trop savoir toutefois vers quel repaire me conduisent mes pas.

La conscience revenue, mon esprit demeure perturbé, je ne suis plus vraiment certain d’avoir ressenti le plaisir que j’attendais de ce meurtre. Faudra-t-il que je recommence pour en être sûr ? Faudra-t-il que je devienne ce qu’ils appellent un « serial killer » ?

 

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25 décembre 2016

les aventures de la mère Macmiche

Liliane Fainsilber -

 

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Dans son manoir en grande partie en ruine, cette vieille toupie de mère Macmiche venait de souper d’une soupe aux choux et d’une miche de pain qu’elle avait partagé avec son chien. Comme elle avait très mauvais caractère personne ne lui rendait jamais visite. Aussi fût-elle très étonnée de voir surgir sur le pas de sa porte un petit homme vert. D’après la description qu’en faisaient les chercheurs de soucoupe volante (soucoupe qu’ils prétendaient toujours avoir vue), il lui semblait bien qu’elle avait affaire à un extraterrestre. Elle en fût d’autant plus étonnée que son chien qui aboyait devant tout intrus n’avait pas aboyé à son arrivée, comme s’il le connaissait de longue date.

Cet extraterrestre parlait parfaitement le français et s’adressant à elle, encore que dans un français très châtié,  lui demanda où il se trouvait, car, tous les appareils de son engin ayant été endommagés et perturbés au moment de son arrivée dans l’atmosphère terrestre, il se sentait complètement perdu. Il se présenta sous le nom d’Olibrius et lui raconta qu’il était tombé en panne dans la clairière voisine avec sa soucoupe volante.

Curieuse, elle demanda à la visiter et, ayant mis ses sabots,  ils s’acheminèrent ainsi vers la clairière. Elle monta par une échelle étroite dans son engin, ce qui,  à son âge, n’était pas évident du tout, et, une fois dans les lieux,  quelle ne fût pas sa surprise de voir, occupant presque tout l’espace,  un énorme gorille dans une cage. Olibrius lui expliqua qu’il l’avait enlevé dans un Zoo pour le ramener sur sa planète. Cet extraterrestre croyait en toute bonne fois que cette terre était peuplée de gorilles et que c’était eux les maîtres du monde. Il en avait déduit que les hommes n’avaient pas plus d’importance pour les gorilles  que des milliers de fourmis ou de termites.  Il comptait donc ramener ce spécimen pour pouvoir mieux l’étudier, une fois rentré chez lui ; La mère Macmiche pensa, à part elle, que dans son désir de retrouver ses pénates, ce petit homme vert n’était pas au bout de ses mésaventures.  Il pouvait en effet  se tromper d’orbite et être  condamné à tourner, avec son gorille, dans l’espace pour l’éternité. Elle rentra chez elle, ayant satisfait sa curiosité. Elle ferma sa porte à double tour, de peur qu’Olibrius ne se ravise et veuille l’emmener elle aussi sur sa planète comme brillant spécimen de l’espèce humaine.

Le lendemain elle raconta cet événement surprenant  à sa voisine mais celle-ci la prit pour une folle. Peut-être avait-elle raison.

27 février 2020

LE RETOUR DU MARIN

 Martine Bouvot

 

Marine_peinture

Ce beau soir d'été 2018, Maëlys de Pontcallec était assise sur les marches de la grande maison -autrefois nommée « le château », dont les murs à présent décrépis, reflétaient cependant la grandeur passée.

Les Pontcallec, à Saint Malo, cela signifiait : bretons et marins.

Elle contemplait le ciel rougeoyant qui embrasait le port.

 Ce soir, à l'aube de ses 80 ans, Maëlys sentait son cœur empli de nostalgie au souvenir de sa jeunesse et de tous ces moments de bonheur et d'exaltation quand ce port s'animait, tel une ruche bourdonnante et joyeuse lors du départ de la mythique « Route du Rhum » et dont elle avait souvent été la marraine.

Souvenirs douloureux aussi de ces marins fiers et courageux qu'elle avait vus partir affronter le terrible Atlantique et pour lesquels, ce fût la dernière aventure.

Ses yeux s'étaient embués de larmes et elle ne vit pas tout de suite l'homme qui venait de s'asseoir à ses côtés.

 Il devait avoir à peu près son âge bien qu'il soit difficile de le déterminer, tant son visage, couvert d'une barbe blanche, était buriné. Il portait un gros pull bleu marine et sa tête, qu'elle devinait blanche aussi, était coiffée d'une casquette ornée d'une ancre de marine. Un marin, à coup sûr !

 Et devant son regard intrigué, l'homme se décida à parler.

 « Ma chère Maëlys, la dernière fois que nous nous sommes vus, c'était en novembre 1978, j'étais au départ de la 1ère Route du Rhum dont tu étais la marraine. 40 ans ont passés mais je n'ai jamais oublié ce matin où je m'apprêtais, plein d'orgueil, à traverser, seul, l'Océan Atlantique.

Le vent soufflait déjà fort lorsque nous sommes sortis du Port et la mer promettait d'être grosse.

Je reviens ici, pour la 1ère fois depuis cette date et je vais te raconter. »

 Au fil des années, son audition ayant pris elle aussi le large, Maëlys dut tendre l'oreille.

 « Je connaissais bien « MANUREVA » mon catamaran avec qui je faisais corps et les tempêtes ne nous avaient jamais fait renoncer.

Je longeais les côtes françaises puis espagnoles, ça tanguait pas mal mais je filais bon train, toutes voiles dehors.

Arrivé au large des Açores, je fus pris dans une tourmente gigantesque d'où mon dernier message à l'équipe qui me suivait par radio depuis St Malo. A l'époque, la radio était le seul moyen de donner sa position...pas de GPS ou autre satellite...

 « Je suis dans l'oeil du cyclone, il n'y a plus de ciel, tout est amalgame. Il n'y a que des montagnes d'eau autour de moi »

J'appris bien des années plus tard qui j'étais et que j'avais été considéré comme définitivement perdu en mer. La presse du monde entier titrait : plus aucune trace ! Et j'ai mis longtemps à retrouver la mienne.

Maëlys cherche en vain dans sa mémoire vieillissante...

L'homme poursuit :

« Mais je reviens aux Açores, enfin à ce qui me semble être le début d'une autre aventure.

Je me réveillai sur un cargo faisant route, me disait-on, vers le Pacifique en passant par le Canal de Panama. Pacifique, Panama, cargo, autant de mots sans signification pour moi.

Le capitaine et l'équipage -philippins, je l'appris bien plus tard- à cours de patience, me déposèrent aux Iles Marquises, où je vécu des années grâce à la générosité des habitants qui contre logement et nourriture me proposaient de petits boulots mais sans jamais me poser de questions sur ma vie, questions auxquelles je n'aurais pas pu apporter de réponses. 10 années se sont écoulées ainsi, heureuses dans cette absence de souvenirs. C'est curieux comme la vie semble simple quand il n'y a pas de passé. »

 Maëlys, de plus en plus intriguée par ce récit n'ose cependant pas l'interrompre, de peur que le beau conte ne prenne fin.   Le conteur poursuit : « Un jour cependant, j'eus la 1ère révélation de qui j'étais.

On m'avait chargé d'aller entretenir un petit lopin de terre, précieusement préservé par les habitants du village. Et je me retrouvai devant 2 tombes où étaient simplement inscrit : sur l'une Paul Gauguin et l'autre Jacques Brel.

 

Le choc fût si violent que je me retrouvai bientôt au sol, terrassé par cette découverte et pleurant comme un enfant. Je venais de retrouver mon ami, mon frère, le Grand Jacques avec qui j'avais partagé tant de virées en mer, avec qui je partageais également l'amour du verbe et du vin.

 C'est à partir de l'ami retrouvé que l'écheveau de ma mémoire a commencé son « rembobinage » comme on dit d'une pellicule effacée. Et je me mis à écrire chaque jour pour remonter le fil. 

Jacques m'avait quitté un mois avant mon départ de St Malo et j'en avais eu une peine immense. »

 Bien sûr, je me souviens se disait Maëlys....Brel est mort en octobre 1978...

 L'inconnu, quelque peu exalté, poursuivit : « Mais autour de Jacques, il y avait ma vie que je mis des mois à reconstituer.

J'étais un marin, je parcourais les océans, j'avais une femme, des enfants, ma tribu que je devais retrouver. J'y suis parvenu.

 Je vis depuis, heureux, en Polynésie auprès de ma chère Teura, nos enfants Vaimiti, Tereva et Torea (les jumeaux) et nos nombreux petits enfants. »

 Maëlys se sent de plus en plus troublée car il lui semble comprendre qui est ce vieux marin assis à côté d'elle...

Il posa alors sa main sur la sienne et murmura « Je voulais, avant mon ultime voyage, revenir à Saint Malo afin de te dire, à toi la marraine de ma Route du Rhum, ma dernière course, toi fille d'une lignée de grands marins, que nous ne mourons jamais, nous retournons simplement à notre élément : la mer ! »

 Excusez-moi Monsieur, je crois que ma mémoire s'est perdue aussi. Je vous avais pris pour mon ami Alain Colas...mais quand elle regarde sur les marches, à côté d'elle, elle s'aperçoit qu'elle est seule.

 

 

29 février 2020

ANNEE 1986

Bernadette Zygart

 

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C’est décidé, je mets un terme à ma solitude

Parfois se produisaient des frictions, en général sur le plan professionnel, notamment un certain vendredi soir, je rentrai chez moi, décidée à me désimpliquer, me libérant ainsi du carcan involontairement imposé dans lequel j’étais.

Et décidai ce soir là de cesser aussi ma procrastination, pour construire enfin mon avenir sentimental ; je confiai cette mission à l’ancêtre de « Meetic », le journal local distribué gratuitement « Inter 59 »…. Je m’empressai d’écrire à deux annonces, cherchant la formule susceptible de capter un candidat potentiel…

Un premier rendez-vous – à la Courte Paille – fut le seul ratage en raison d’une absence de précision de lieu (il y avait deux possibilités), tandis qu’il était persuadé qu’il s’agissait de l’une, je l’attendais à l’autre avec effervescence !

Pour un lapin, ce fut plutôt un « lièvre ! ». Mais le hic est que je n’avais de lui aucune coordonnée (donc impossibilité de l’interroger) et lui n’avait que mon numéro de téléphone.

Cette fois là j’attrapai opportunément un vilain rhume qui m’obligea à rester à la maison, ce qui permit de recevoir le coup de fil que j’attendais. Il avait cru que j’avais changé d’avis quand il m’avait dit par téléphone avoir trois enfants à la maison !

Rendez-vous fut donc pris pour le samedi suivant, ce fut le bon …

Cette première rencontre fut d’emblée concluante, la conversation tellement aisée !

Nous en sommes aujourd’hui à la 34e année, épatés toujours par les hasards qui ont fait notre rencontre…

 

Deux planètes dans l’Infini de l’Univers, s’arrimant l’une à l’autre.

 

Ses trois enfants sont devenus les miens par adoption simple ; leurs enfants –quatre filles !- sont devenues mes quatre petites-filles lesquelles me comblent de leur gentillesse.

(et je m’arrête ici, ayant atteint les 1500 caractères exigés !!!!!)

16 mai 2016

Les petits bonheurs

DSCN0268Liliane Fainsilber -

La vieille armoire bretonne, que nous avons un jour acheté chez un antiquaire de Lannion ne nous a jamais plus quitté. Elle nous a suivi de maison en maison, trouvant toujours sa place le long d'un mur de notre chambre. Elle n'est pas très grande et plutôt trapue. Elle est toute simple et rustique. C'est elle qui nous a donné le goût des beaux vieux meubles anciens. Tous les matins en me réveillant et tout au long de ces nombreuses années, j'admire ses deux portes sculptées. D'une main maladroite, comme au couteau, l'artisan a tracé deux doubles volutes sur leur panneau central. Celui-ci est fait d'un bois un peu plus clair, ce qui donne à ce motif décoratif du relief. C'est la maladresse même du dessin de ce panneau sculpté, sa rusticité, qui est émouvante. On pense au paysan qui a peut-être coupé un de ses châtaigniers, l'a débité en planches qu'il a mis à sécher et qui a ainsi fabriqué ce meuble, le soir à la veillée, à la fin de sa journée de travail, pour meubler sa nouvelle modeste maison et s'y installer auprès de sa femme. Une ferronnerie métallique qui est incrustée sur le bord de ces deux portes donne à ce meuble, d'un trait de lumière vertical, à la fois de la distinction et de l'authenticité.

Cette armoire qui nous a accompagnée, comme une vieille amie tutélaire, est toujours pour nous, dès que nous la regardons, que nous l'admirons comme un bel objet, un moment précieux de bonheur, un petit bonheur.

 

Car il y a certes de grands bonheurs, celui de vivre avec l'homme qu'on aime, celui de mettre au monde des enfants. Pour ces bonheurs-là il faut avoir de la chance, comme l'évoque l'étymologie du mot lui-même. Tous les hommes et les femmes n'y ont pas droit ou tout au moins pas tout au long de leur vie. On peut ne pas avoir cette chance. Heureusement, à côté de ces grands bonheurs, il y a aussi plein, plein de petits bonheurs, ceux dont jamais personne ne pourra nous priver, malgré tous les aléas de la vie, car ils sont à la portée de tous : une nuit étoilée, un petit matin indécis dans la brume, l'odeur du pain chaud qui sort du four, celle du thym foulé sur un chemin de campagne ou encore celle des feuilles du figuier chauffées sous un soleil de plomb, le bruit de la mer lorsque les vagues viennent mourir sur la plage, un délicieux bœuf aux carottes longuement mitonné et surtout partagé avec deux ou trois de nos proches amis. Avec chacun de ces petits bonheurs, il faut savoir saisir sa chance : surtout ne pas les laisser s'échapper.

 Me vient alors le souvenir d'un très court poème de Paul Fort :

 "Le bonheur est dans le pré

Cours y vite, cours y vite.

Le bonheur est dans le pré,

Cours y vite, il va filer.

[…]

 

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2 mai 2016

D'un continent à l'autre

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Liliane Fainsilber -

Paloma est une jeune fille brésilienne, elle appartient à la tribu indienne des bororos. Petite, elle a d'abord vécu dans la réserve mais ses parents sont ensuite venus vivre dans les bidonvilles de Sao Paulo dans l'espoir d'y trouver du travail. Elle a eu beaucoup de chance, car elle a pu aller à l'école et apprendre à lire et à écrire dans une petite école de son quartier tenue par une ONG. Comme elle est passionnée par la lecture, elle a appris beaucoup de choses par elle-même, dans les bibliothèques. L'un de ses maîtres, s'étant aperçu de son intense désir de se cultiver, lui avait obtenu une bourse pour suivre des études à Londres. Elle souhaitait beaucoup devenir ethnographe, selon un vieux rêve de son enfance. En effet, petite fille, elle avait rencontré le grand Claude Lévi-Strauss, qui était encore, à cette époque, un jeune homme au début de sa carrière. Il s'intéressait, à cette période de sa vie, aux grands mythes de sa tribu. Au cours de l'un de ses voyages d'études, il l'avait même prise en photo auprès de sa mère et avait troqué, à la suite de longues discussions avec elle, le grand collier de graines qu'elle portait. En échange, il lui avait donné une jolie petite boite en bois sculpté que depuis elle avait toujours précieusement conservée. Devenue grande, Paloma, avait lu un de ses livres qui lui avait beaucoup plu, encore que très savant. Son titre l'avait attiré, c'était « La potière jalouse ».

 

C'est ainsi qu'à l'âge de vingt ans, ses premiers diplômes en poche, elle avait pris l'avion et s'était retrouvée toute seule et certes un peu perdue, dans la grande métropole londonienne. A l'université, on s'était occupé d'elle et elle avait donc trouvé à se loger en colocation, dans un appartement en plein centre de Londres, où logeaient déjà deux brésiliens. Ainsi elle se sentirait déjà moins seule et moins dépaysée. Elle s'installa dans sa toute petite chambre et se risqua à explorer le reste de l'appartement. Dans le salon qui était commun à tous les colocataires, elle rencontra un jeune homme très svelte, encore plus basané qu'elle-même, qui dégustait son thé. Il s'appelait Idriss. Lui aussi était indien, mais il venait des Indes. Il parlait anglais, une langue que Paloma ne maîtrisait pas encore beaucoup, mais qu'elle pouvait au moins comprendre. Ils éprouvèrent d'emblée de la sympathie l'un pour l'autre et eurent envie de faire plus ample connaissance. Il l'invita à aller manger dans un petit restaurant indien au coin de la rue. Il lui fit goûter à de délicieuses galettes de farine de pois-chiches et à du poulet tandori. Idriss faisait des études en sciences économiques et venait d'une des plus belles régions de l'Inde, le Radjastan. Il était né dans la magnifique ville ancienne de Jeisalmer et était le fils de l'un des derniers Maharadjahs de l'Inde. Il lui raconta que pour pouvoir continuer à entretenir son palais, son père l'avait transformé en hôtel de luxe. Cela fit rêver cette petite indienne venue des faubourgs de Sao Paulo. Comme le monde était vaste et plein de belles choses à découvrir !

 

Ils étaient attirés l'un par l'autre et Idriss trouvait Paloma très belle mais il était encore bien trop tôt pour savoir ce que deviendrait la rencontre surprenante de ces deux indiens dans la ville de Londres. Bien trop tôt pour deviner si cette petite indienne d'Amérique du sud serait jugée digne de devenir une des dernières marahanis du Radajastan. Idriss était en effet de nature précautionneuse et mesurait longuement tous les risques encourus du simple fait de tomber amoureux. Il y pensa si longuement qu'il laissa passer sa chance.

 

Entre temps, Paloma avait rencontré, sur les bancs de l'université, Donald, un écossais. Elle le trouvait très séduisant, portant dignement kilt et hautes chaussettes blanches. Il jouait merveilleusement bien de la cornemuse. Il l'invita en Ecosse dans le château de ses ancêtres, un château qui était, selon la légende, hanté par l'ancienne châtelaine qui, jalouse, venait réoccuper les lieux par les nuits de clair de lune. Mais il en fallait bien plus pour effrayer Paloma, cette petite indienne bororo née dans la forêt amazonienne. Ce n'était pas ce pauvre fantôme venu du fond des âges qui pourrait la faire renoncer à son nouvel amour. Elle l'attendrait de pied ferme bien résolue à la chasser à jamais. Ses ancêtres lui avaient en effet transmis de bien précieuses incantations pour chasser tous les mauvais esprits. Mais seraient-elles efficaces dans ce sombre château d'Ecosse ?

On peut quand même se poser la question de savoir si, dans sa petite chambre d'étudiante, à Londres, imaginant ce fabuleux palais du Marahadjah aux Indes et ce manoir écossais hanté, Paloma n'avait pas ainsi bâti quelques châteaux en Espagne, bien loin de la modeste hutte de son village natal, dans la réserve indienne.

 

 

3 mars 2020

2150, Les arbres ont pris le pouvoir…

Nicole Borel (Avril 2019) 

 

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Homme, pendant toutes ces années

Tu ne m’as pas épargné

Moi qui étais ton oxygène

La charpente de ta maison,

La planche de ta table,

Le lit de tes nuits,

Le bois de tes navires,

Le manche de ta pelle,

La porte de ta demeure,

Le bois de ton berceau

Et celui de ton cercueil.

J’entends aujourd’hui ta supplication

Pour nous faire entendre raison :

Plus de feu dans l’âtre,

Plus d’ombrage ami lorsque brûle le soleil d’été.

Bientôt plus d’air dans nos poumons.

Abattez toutes ces barrières

Erigées par vos frères belliqueux

De leurs troncs vaniteux

Nous privant, nous les hommes, du vital éther.

Devant tant d’exactions,

Moi, le vieux chêne de Brocéliande

Le cèdre du Liban et le vieux pin des landes

Avons trouvé une solution :

Flatter les orgueilleux

De vous avoir ouvert les yeux

Féliciter les arbres, nos frères victorieux

D’avoir protégé nos cieux

Ainsi ils rendraient les armes

Et sécheraient vos larmes.

Le vent a porté l’affaire

A travers les forêts.

Les arbres de la Terre

Dans un souffle de paix

Ont écouté leurs aînés

Et pardonné aux hommes égarés.

Ils se sont tendu les mains

Au-dessus des humains

Dans une harmonie retrouvée

Les barricades abaissées.

 

 

 

 

6 mars 2020

Cap sur mon rêve…

Nicole Borel

 

 

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Aujourd’hui encore, je me demande comment j’ai pu en cette année 1991, prendre cette décision qui allait transformer radicalement ma vie et celle de ma famille. Etait-ce bien moi ?

Ou était-ce le bicentenaire de la Révolution célébré deux ans plus tôt qui avait réveillé mon besoin de liberté ou une prise de conscience soudaine que moi seule me posais mes propres limites dans une vie où je me sentais de plus en plus contrainte et bloquée par une réalité qui me retenait.

L’idée a germé à mon insu, probablement tapie dans un coin de ma mémoire, guettant le moment propice. J’avais toujours rêvé de devenir institutrice, ce rêve refaisait surface l’année de mes 32 ans, refoulé jusque-là, mis à mal par ma volonté de ne pas décevoir mes parents qui avaient choisi une autre voie pour moi.

La vague du changement s’est formée sous les vents dominants d’une détermination que je ne me soupçonnais pas, elle a tout balayé pour satisfaire un besoin vital à cette période de ma vie, qu’importe si j’étais mariée, mère de trois enfants, un travail, une maison, une vie rangée en somme, un confort tranquille dans lequel je m’étais oubliée.

Ma réussite au concours, auquel j’avais décidé de m’inscrire cette année-là, a été la septième vague, celle qui a tout emporté, a fait face aux vents contraires en chamboulant toute ma vie, m’éloignant des miens, de ma région car admise non pas en Bretagne où j’avais toujours vécu mais à Versailles, curieuse coïncidence. C’est l’instant où tout aurait pu basculer n’étant pas préparée à ce dilemme …

Notre vie, cette année-là, a pris une autre destination.

Implacablement, j’ai mené mon projet à son terme, tel un bateau à bon port, contre vents et marées : flux, reflux, secousses, tournoiements, grêles et pluies ont fait ma force et ont été le moteur de mon changement de vie.

 

 

 

 

 

 

 

Nicole Borel (Février 2020)

28 mars 2020

Visite à l'abbaye de Cluny

Zabeth Stépan

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Ce 24 juillet 2019, me voici à Cluny devant le site de cette abbaye bénédictine fondée il y a plusieurs siècles. Il est imposant bien qu’il n’en reste qu’une moindre partie, souvenirs émouvants de la majesté d’une construction qui date du XIème siècle.

Devant mon regard se dressent encore des vestiges, entre autres, le clocher de l’Eau Bénite, les bras sud des grands et petits transepts, les tours des Barabans qui encadraient le portail ou encore la Tour des Fromages. Vestiges qui ne représentent que trop peu l’ensemble des bâtiments qui faisaient de cette abbatiale l’une des plus grandes de la chrétienté du haut Moyen-âge.

Une maquette autour de laquelle les visiteurs s’agglutinent me permet d’imaginer et de comprendre l’importance de l’abbaye et de ses dépendances monastiques. Alors, je m’assieds, je ferme les paupières et petit à petit, me voici plongée dans un autrefois envoutant.

J’entends sur les dalle lisses glisser les pas lents des moines silencieux qui, les yeux baissés, les mains croisées sous le scapulaire, arpentent les allées du cloître bordées de chapiteaux aux sculptures typiques de l’art roman. Ils quittent dès la fin des vigiles leurs cellules austères, je les suis en catimini et les accompagne vers l’église à la nef déserte pour les matines, la première prière, celle qui illumine le chœur. Là, leurs voix graves et profondes entonnent à cappella un chant majestueux qui s’élève vers le ciel. Aucune musique ne les soutient et ce latin auquel je ne comprends pas grand chose m’émeut cependant au plus haut point.

Dure règle, sévère, qui contraint, mais à laquelle aucun des moines ne semble vouloir se soustraire. Au contraire, je ressens cette sérénité si évidente que j’en deviens moi-même tranquille et paisible. Un sentiment de bien-être m’envahit et m’entraîne à suivre les coules, ces robes de laine brune uniformes qui effacent toutes les différences.

A leur suite, je m’assieds dans le réfectoire, au bout d’une longue table rustique et je partage avec tous les convives un frugal déjeuner. Le silence règne ; un des moines, debout devant un lutrin, tourne les pages d’un lourd volume à la tranche dorée. Une fois son choix fixé, il lit à voix haute, certes sur un ton assez monocorde, un passage de la Bible, prétexte à la méditation.

Puis la journée avance, point de repos, point d’inactivité, point de bruit incongru, (me reviennent cependant les rires déplacés et dangereux entendus dans le Nom de la Rose) mais ici rien de tel !

Comme tout un chacun, j’œuvre. Mon choix se porte vers l’écriture, je pousse avec quelques moines de chœur la porte du scriptorium, m’installe devant un emplacement libre et commence à écrire avec un calame ou une plume d’oie. Recopier les textes anciens, dessiner des enluminures, que voilà une tâche utile qui passera à la postérité ! Je regarde à la dérobée mes voisins, qui travaillent et s’appliquent sans être le moins du monde distraits. Quant à moi, je sais que des manuscrits vieux de neuf cents ans ont été retrouvés et font partie de collections de la BNF. Eux, ne s’en doutent pas et cela ne peut pas les intéresser, pas le moins du monde.

Le temps passe, calme, rythmé par la prière, la lecture, le travail, le silence. Je suis dans un monde surprenant, une époque presque oubliée. Je suis loin, comme hors du temps, étrangement, même cette règle d’obéissance ne me perturbe pas. Tout me semble normal.

En compagnie des frères jardiniers, en promenade méditative autour des parterres du cloître où ils cultivent les simples, je m’incline respectueusement devant l’abbé, le prieur qui nous dirige, celui qui est notre père spirituel.

Enfin, lorsque le soleil se couche et que la nuit tombe, les complies, la dernière prière, ferme la porte de cellules et ne règne plus alors qu’un silence parfait et ô combien réparateur !

Soudain, qu’est-ce que j’entends ? Quel est ce bruit insistant, saugrenu et strident qui vient de rompre le silence et me déranger ? Il me tire brusquement de mon état de contemplation et m’oblige à ouvrir les yeux. Je me réveille et me vois dans le hall d’accueil… entourée d’une foule de visiteurs qui s’agitent, parlent à voix haute et photographient à tout va avec leurs téléphones portables. Et comment dire ? C’est bien un de ces téléphones qui, intempestivement m’a ramenée à notre époque. J’éprouve quelque regret un peu fugace à me retrouver dans notre temps, celui que ma rêverie m’avait fait quitter.

 Prétexte : Racontez-nous, mettez en écriture ce que vous sentez, voyez, dans ce lieu que vous avez choisi. Commencez ce texte par : en 2019…

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22 avril 2020

La route de Madison

 Martine Bouvot 

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vermont

Lors d'un voyage aux USA et parcourant le Vermont, je me suis trouvée, au détours d'une forêt d'érables flamboyants en cet été indien, face à un de ces ponts couverts en tout point semblable à celui qui fait le décor principal du film : La route de Madison.

 L'histoire me revint en mémoire.

 Carolyn et Michael découvrent le secret de leur mère, Francesca, après son décès.

 Un carton, soigneusement conservé depuis de nombreuses années.

 A l'intérieur, ils y trouvent un appareil photo, des albums, des lettres, des photos montrant leur mère jeune et radieuse, appuyée à la rambarde du pont Roeman, souriant au photographe qui avait signé ses albums : Robert.

 Les lettres, datées, disaient tout de cette liaison courte mais passionnée entre Francesca et Robert.

 Les adultes qu'ils étaient devenus se souvenaient de ce long WE où ils étaient partis avec leur père au salon agricole afin d'y présenter leur plus belle vache.

 A leur retour, la vie semblait avoir repris son cours sauf dans le cœur de Francesca à jamais empli de ce moment d'amour fou qu'elle avait vécu.

 Dans chacune de ses lettres, Robert la suppliait de le rejoindre jusqu'à celle annonçant la mort du photographe.

 Pourquoi me suis-je sentie concernée par ce film ?

 Je crois que beaucoup de femmes, comme Francesca, ont préféré la raison à la passion, c'est peut-être pour la sécurité qu'offre une vie tranquille entre un mari rassurant et des enfants joyeux.

 L'aventure avec cet artiste l'aurait sans doute emmenée dans un monde de passion mais sans certitude.

 De celles qui partent, ne dit-on pas qu'elles sont des aventurières, voire des femmes légères, terme bien péjoratif.

 Celles qui restent, envers et contre tout, sont qualifiées de bonnes épouses !

 Qu'aurais-je fait si j'avais rencontré Robert....Clint ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

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26 novembre 2015

Le père Camille

 Daniel Fainsilber -

 

Paysan-Vosgien

Dès la petite enfance, vers cinq ou six ans, j'ai toujours aimé le jardinage et je descendais au jardin pour travailler avec le Père Camille. Cet homme approchait de ses quatre vingts ans, ce qui à l'époque était un exploit. Il avait des gestes lents mais harmonieux, la parole rare mais amicale. Il me montrait le travail de la nature, j'écoutais ses paroles avec grande attention . Il m'expliquait quel soin il fallait apporter aux plantations, à quel moment semer, désherber et aussi démarier les carottes et les radis, à quoi on reconnaissait la maturité et quand on pouvait récolter. Je me souviens qu'il m'avait réservé un carré de jardin et confié un semis de radis. Il avait été tout étonné de mon goût pour le jardinage.

Il entremêlait volontiers le français et le patois du nord : « Min Tchiot », mon petit, « Em Fieu », mon fils, « Pousse El Berrouette », « t'occupe nin du capio del gamine tire el carette ».

il y avait aussi d'autres mots qui me plaisaient bien tel « el bistouille » qui était un café arrosé de calvados. J'admirais beaucoup ses vêtements en velours côtelé de couleur bronze. Une chaîne en argent ondulait sur son gilet et maintenait une grosse montre ronde dans la pochette à portée de main. Il portait une casquette elle aussi en velours côtelé. Il avait de belles moustaches, des sourcils très fournis et une peau ridée.

Ce personnage contrastait avec mon père qui lui, était toujours en costume de ville avec gilet, veston et col de chemise amidonné. Le jardinage lui était étranger et il avait bien du mal à planter un poireau.

 Très souvent ma mère me confiait la préparation de la soupe de légumes. J'avais plaisir à aller avec un panier et un couteau choisir des feuilles de chou, de betteraves, de salade , déterrer des poireaux et des carottes. J'étais d'autant plus content que mon frère craignait toujours de se salir les mains, alors que de mon côté j'aimais bien toucher la terre.

 

Il y avait au milieu du jardin une butte de terre au sommet de laquelle trônait un vieux frêne pleureur. Mon père y avait fixé deux balançoires et avec mon frère c'était à celui qui se projetterait le plus haut. C'était joyeux, nous étions des enfants heureux ! Je garde comme image de bonheur le souvenir d'un merle qui chantait, posé sur le faîte du toit, bien droit sur ses pattes. Le ciel était bleu, l'air doux du printemps. Mon frère et moi sur les balançoires et ce merle qui chantait à tue-tête, il criait sa joie et son bonheur de vivre.

 

 

 

 

22 octobre 2015

La fille du chef des voleurs

 

Captain-Fracasse-2300 Liliane Fainsilber - 

 

Hélène laissa tomber le livre qu'elle lisait, le dernier prix Goncourt, et se mit à rêver avec nostalgie à d'autres romans, les romans qu'elle lisait avec passion au temps de son enfance et de son adolescence. Ainsi elle avait beaucoup aimé, pour leurs atmosphères poétiques et oniriques, la Vouivre de Marcel Aimé que le Sarn de Marie Web. Mais celui qui avait sans nul doute marqué son adolescence était ce beau roman de Théophile Gauthier, au titre conquérant mais en même temps un peu ridicule «  Le Capitaine Fracasse ».

 Longtemps après, devenue adulte, comme elle s'était demandé pourquoi les personnages de ce roman avait exercé une telle fascination sur elle, elle avait eu envie de le relire. Elle avait retrouvé avec grand plaisir chacun de ses héros, dont bien sûr ce pauvre baron de Sigognac que l'on découvrait au début du roman, dans son château en ruine. Il avait suivi, de son pays de naissance, la Gascogne, une troupe de comédiens jusqu'à Paris. Pour les nécessités de l'intrigue, c'était lui qui était monté sur les planches, après la mort de celui qui jouait le rôle du Matamore, pour le remplacer sous le rôle du Capitaine Fracasse.

Bien sûr, comme l'exigeait la trame du roman, il était tombé amoureux de l'ingénue, Isabelle, qui était à la fois, comme il se doit, belle et vertueuse. Telle que se présentait l'intrigue, leur amour était de l'ordre de l'impossible puisqu'une comédienne ne pouvait épouser un noble, les bergères n'épousant jamais les princes, mais l'auteur du roman avait veillé au destin des deux amoureux. Grâce à une précieuse améthyste qu'elle portait à son doigt, le duc de Valombreuse, put reconnaître en elle, la fille qu'il avait eu avec une comédienne. Tout s'arrangeait donc, elle était donc elle aussi de noble naissance. Ils purent se marier et eurent beaucoup d'enfants.

Mais cette Isabelle était en tant que femme assez peu intéressante, plutôt terne, c'était un autre personnage qui avait beaucoup plus attiré l'attention d'Hélène, celle à qui elle s'était identifiée, c'était Conchita, une fillette, à la lisière de l'enfance et de l'adolescence, maigre et sale, habillée de haillons et qui vivait en compagnie d'un voleur de grands chemins. Un jour qu'ils avaient attaqué la troupe des comédiens, au coin d'un bois, pour les détrousser, Isabelle lui avait offert son faux collier de perles. Eblouie par ce cadeau grandiose, Conchita en avait conçu une grande reconnaissance envers elle et lui était restée très attachée. Dès qu'Isabelle était en grand danger, et cela lui arrivait souvent, Conchita intervenait toujours à point nommé pour lui porter secours.

 Devenue adulte, Hélène s'était certes posée la question de savoir pourquoi elle n'avait pas choisi au moins Isabelle comme modèle, même si un autre personnage de femme, prétentieuse et orgueilleuse, Diane de Foix, n'avait pas suscité sa sympathie. Quel avait été pour elle, adolescente, l'attrait de cette pauvre Conchita, était-ce son apparente liberté, en tant qu'elle échappait ainsi à toutes les contraintes morales de la société ? Cela n'était pas impossible mais n'était peut-être pas une cause suffisante.

D'autres motivations inconscientes avait été pour elle mises en jeu. Comme elle l'avait appris de ce grand inventeur de la psychanalyse que fut Sigmund Freud, les poètes et les romanciers sont ceux qui savent transcrire dans leurs œuvres les rêves d'amour et de gloire de tous les êtres humains, ceux des hommes comme ceux des femmes. Mais ces rêves sont cependant gardés secrets y compris le plus souvent de nous-mêmes. Quand nous les découvrons dans les romans nous sommes émus et satisfaits que ces poètes aient pu les formuler, les exprimer à notre place.

C'est ce qui était arrivé à Hélène avec cette histoire de la petite Conchita. Le père d'Hélène n'était pas originaire de la Gascogne mais de la Catalogne. Il portait un beau nom, nom qu'il avait donné à sa fille. Quand on le prononçait en français il était tout fait ordinaire et raisonnable, mais en catalan, il prenait du lustre et aussi une double signification. Il pouvait s'appeler soit André du « Champ de l'aire », ce qui donnait d'emblée, à ce nom une dimension agreste, voire agricole. Mais il pouvait aussi devenir André « chef des voleurs », « chef des larrons », « cap dei laïre » ce qui faisait donc de ce père, un bandit de grand chemin. C'est ainsi qu'Hélène était comme la petite Conchita, la fille du chef des voleurs, elle vivait elle aussi, sans foi ni loi, au milieu de ces bandits tandis qu'ils attaquaient les diligences.

Heureusement Hélène n'avait pas entièrement calqué son destin sur celui de cette héroïne souffreteuse et plutôt victime, entre temps elle avait été sensible à d'autres influences. Malgré le nom qu'elle portait, elle n'avait jamais rien volé de sa vie, en tant que fille d'un bandit de grand chemin, sauf peut-être quelques cierges ou vieux chapelets dans des églises, mais c'était plutôt par provocation et pour rendre à César, tous ces César que rêvent d'être les hommes, ce qui avait été injustement donné à Dieu.

 

 

14 août 2019

Histoire d’une gomme

Bernadette Zygart 

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Ma gomme, telle que je l’ai (re)trouvée dans ma trousse d’écolière studieuse, perdue au milieu de stylos tandis que je cherchais un taille-crayon.

Elle « accusait » les années ! Je me souviens d’elle, toute neuve, souple et d’un gris presque blanc. …il existait d’autres modèles, avec une partie souple et une partie rigide mais c’était l’autre que je préférais ! Et voilà que mon esprit vagabonde : si elle pouvait parler, elle en raconterait des choses qu’elle fut parfois contrainte d’effacer, encore et encore, ces exercices de calculs pour lesquels j’étais peu douée !! Cela sert à cela, une gomme oui ?? Mais pas que. On peut lui trouver d’autres attributions.

Allez voir dans le dictionnaire et vous m’en direz des nouvelles ! Vous verrez qu’en plus de son principe effaceur, de « faire disparaitre », il est un tas d’interprêtations parfois surprenantes !

Si je vous dis « mystère et boule de gomme », savez-vous ce que cela veut dire ? La boule s’inspire du modèle en cristal de Mme Irma la voyante qui se trouverait soudain envahie de gomme (arabique cette fois !) et donc s’opacifierait, rendant impossible toute lecture de l’avenir, réduisant au chômage notre professionnelle de la prédiction….

Un autre thème qui me rappelle mon enfance : avec un papa commerçant en café et confiseries, j’étais amenée parfois à préparer les commandes pour ses livraisons à l’extérieur. Et l’hiver il proposait des « boules de gomme » - petits dés – pour calmer les maux de gorge, vous voyez ce que je veux dire ? Et, cela n’a rien à voir avec la gomme, mais j’ai envie de vous évoquer une autre friandise : la guimauve qu’il m’arrivait de subtiliser dans les boites ; toute fraîche elle était délicieuse !

Autre signification : l’agar agar qui entre dans les préparations culinaires, sorte de gélatine. Mais nous nous éloignons de la gomme !

En revanche, si vous devez vous presser parce que vous êtes en retard, vous mettrez « toute la gomme » pour arriver à l’heure à votre rendez-vous !

 

Mais c’est avec sentimentalité que je reviens à la signification première de ce petit objet si utile tout au long d’une vie ! A qui l’on demande d’effacer ce qui vient d’être écrit ou dessiné : un lien se noue entre la main et l’objet, comme une complicité, quand par exemple il s’agit d’ombrer un dessin pour mieux le mettre en valeur.

Ma main qui gomme, c’est l’interprétation du dessin selon moi, c’est le sentiment que m’inspire ce que j’ai écrit et que je peux supprimer, ignorer, regretter ou nuancer pour exprimer ce que je veux transmettre avec exactitude.

Gymnastique de l’esprit, de l’âme, qui osent, se décident, qui acceptent la suite.

MAIS…..On ne peut pas tout gommer ! Ce serait alors refuser d’avoir vécu, sous prétexte que l’on voudrait que « cela » n’ait pas existé ! Que l’on ait été heureux ou malheureux, c’est « notre vie » quoiqu’ on veuille ! Et l’accepter, c’est « accueillir » la façon dont les choses ont été gérées, c’était « nous » telle que nous étions à ce moment-là. Et cette fois, pas vraiment le moment de gommer !!

 août 2019-08-11

 

 

27 février 2020

La potion magique du dr. Abramovitch

Liliane Fainsilber

 

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Sur Internet, je vois une annonce qui me plaît bien. Le docteur Salomon Abramovitch propose une pilule miracle capable de vous rendre, selon la dose commandée, vos jambes de vingt ans ou celles de cinquante. Comme il faut quand même savoir être raisonnable, j'opte pour celles de cinquante, pensant que ce sera déjà pas mal. Je pourrais ainsi lâcher ma canne pour quelques jours et faire enfin un ou deux chemins de grandes randonnées dans les Gorges du Verdon. Il y a si longtemps que je rêve de les emprunter. D'un coup de click je commande donc cette potion magique. Mon compte Paypal simplifie bien les choses puisqu' il suffit d'avoir envie de quelque chose pour aussitôt se l'offrir, sans plus y réfléchir. J'attends donc avec impatience de recevoir ce précieux colis.

 

Pendant ces deux ou trois jours d'attente, je pense à notre équipement nécessaire, un vêtement chaud mais léger et surtout de bonnes chaussures de marche. Dans la foulée nous achetons aussi une gourde indispensable pour étancher notre soif et aussi un petit fascicule des chemins de grandes randonnées de la région. Le feuilleter est déjà en soi un vrai grand plaisir. Nous en choisissons un qui, parcourant en hauteur la rive droite du Verdon, arrive au dessus du village de Moustiers Sainte Marie. Nous nous y voyons déjà et c'est tout juste si je ne me laisse pas aller à retenir une chambre à l'Hôtel de la Vigne muscate, sur la place de l'Eglise. C'est un vrai bonheur de penser à ce beau projet de ballade.

 

Le colis nous arrive enfin, le produit est contenu dans un petit flacon violet de belle allure. Je lis avec attention le mode d'emploi. Il faut en prendre vingt gouttes matin et soir pendant trois jours. Nous le partagerons Daniel et moi et, demain matin, nous partirons aussitôt pour les gorges du Verdon. J'espère que les gouttes de cette potion magique seront efficaces. Je ne me laisse pas décourager par le scepticisme de Daniel et je garde la foi. Le docteur Salomon Abramovirch ne saurait mentir.

 

Pourtant Daniel avait bien raison de ne pas croire à ces promesses de rajeunissement, le lendemain arrivés sur les lieux, nous avons juste eu le temps de faire un kilomètre sur ce beau chemin et d' y admirer ces magnifiques paysages. Ma hanche à recommencé à me faire très mal et Daniel s'est mis, lui aussi, à boitiller. Nous nous sommes assis à l'ombre d'un arbre sans pouvoir faire un pas de plus et, comme il était presque midi, nous avons attaqué notre pique-nique de bon appétit puis nous avons même fait une petite sieste sur un coin d'herbe et nous avons courageusement rebroussé chemin. Nous reviendrons sans doute dans un autre vie, mais en attendant, cette ballade même raccourcie était bien agréable. Merci docteur Salomon Abramovitch !

15 janvier 2017

Robinsons

Sur une île déserte par Zabeth STEPAN

Qu’il a chaud, soif  et qu’il est fatigué ! Sébastien s’essouffle, ses petites jambes s’épuisent à suivre le rythme infernal imposé par son père. Celui-ci ne manifeste aucune attention, ne se retourne pas, avance impitoyablement à travers la végétation luxuriante, écarte les lourdes feuilles avec des gestes brusques.

Jungle

 Depuis deux jours, ils explorent cette terre inhospitalière. Qu’espèrent-ils découvrir ? Pour le moment, ils ne trouvent rien, rien qui puisse les tranquilliser, qui leur permette d’échapper à cette solitude.

Tels Robinson et Vendredi, il faut comme leurs prédécesseurs se contenter de si peu… Quesion nourriture, quelques fruits nouveaux cueillis sur des arbres inconnus, par chance sucrés et juteux ; ils ont bien tenté de mâchonner de ces feuilles luisantes, elles ont l’air assez appétissantes ;  mais leur texture trop ferme et leur goût bizarre et surprenant les ont inquiétés et découragés. S’ils risquent une intoxication, ce serait une catastrophe !

Heureusement, l’eau ne manque pas, des filets limpides ruissellent dans ce fouillis végétal. Des oiseaux criards volent à travers les branches, impossible de les attraper et de toute façon, comment les cuire ? La question se pose également pour les reptiles effrayants qui ondulent dans la mousse humide. Eventuellement ils pourraient croquer des insectes, ils sont si nombreux, cela se fait dans les pays asiatiques, ils l’ont vu dans des documentaires à la télé, mais là-bas, ils les font griller. C’est affreux d’avoir faim pense  l’infortuné Sébastien dont l’estomac gargouille lamentablement !

L’enfant a peur. Malgré la confiance aveugle qu’il a toujours eue envers son père, cette fois-ci, rien ne le rassure. Et Vincent le père, lui, ne dit mot, il marche, tel un automate, il sent bien qu’il va falloir réconforter son fils, ce gamin adorable qui ne compte que sur lui, parce que maintenant il n’a plus que lui ; il est profondément désemparé et malheureux. Il pense …

Tout avait pourtant bien commencé avec ces vacances extraordinaires programmées depuis plusieurs mois. Un projet un peu fou, mais organisé dans les moindres détails. Son voilier, « l’Invincible », les attendait dans le port de Valparaiso qu’ils avaient rejoint en avion.

Avec ses amis, André, Claudine et leur fils Nicolas, ils avaient embarqué dans la joie un beau matin du mois de juin. Leur  périple devait les amener en Polynésie. Les premières semaines furent idylliques : des escales de rêve, des journées resplendissantes éclatantes de soleil, des nuits féeriques scintillantes d’étoiles, des passages de dauphins bondissants, des vols d’exocets au-dessus des vagues. Bref, le bonheur. Il y avait bien eu quelques passages de mauvais temps, mais rien de vraiment inquiétant… jusqu’à ce mardi 16 août, vilaine date marquée d’une pierre noire.

 

Le vent s’était levé, furieux, secouant le voilier tel un fétu de paille. Les vagues énormes le soulevaient, les gréements craquaient et gémissvoilieraient. Cramponnés aux mâts, ils se croyaient perdus dans les cinquantièmes rugissants, cette zone si redoutée par les navigateurs. Une peur affreuse gagnait les malheureux passagers, les voiles se déchiraient, le danger devenait imminent. Chacun d’enfiler rapidement son gilet de sauvetage, en hâte, ils mirent à l’eau le canot de secours et abandonnèrent leur esquif en perdition. Pourvu que les SOS envoyés dans l’urgence permettent aux secours de les retrouver et de venir à leur aide… C’était le dernier espoir. Puis ce fut le trou noir. Qui avait embarqué, qui avait résisté, qui était sauvé ? Impossible à dire, les souvenirs se brouillaient, peut-être qu’ils avaient perdu connaissance, ballotés par les flots déchaînés. La seule chose dont ils étaient conscients, c’est de s’être réveillés trempés, allongés sur le sable de cette petite île, seuls tous les deux.

Et leurs amis, alors ? C’est pour espérer les retrouver, sûrement échoués eux- aussi qu’ils arpentent ce minuscule territoire en suivant le rivage. C’est pour cela que Vincent appelle, attendant une réponse, mais rien ne se manifeste. Mais alors comment les retrouver ?

Au bout de ces deux jours, découragés, ils réalisent être revenus à leur point de départ. Ils sont seuls, horriblement tristes d’avoir perdu leurs compagnons, sont-ils sur une autre île ? Pauvres naufragés, abandonnés, sans aucun des moyens de communication modernes qui leur sont familiers. Que vont-ils devenir ? Le désespoir les envahit, ils se regardent affolés, père et fils se serrent l’un contre l’autre, muets d’épouvante…

 A ce moment précis, Sébastien relève la tête, pose son stylo et prend la feuille qu’il a noircie d’une écriture fébrile. Son texte l’a absorbé, il n’a pas vu passer le temps, tout à son histoire. Le professeur de français a donné à la classe de 3ième  dont il fait partie, ce sujet de rédaction pour lundi :

« Seul sur une île déserte, vous sentez-vous Robinson Crusoé ? »

Ce thème lui a plu, l’a vivement intéressé et son imagination a fait le reste.

Cependant, il lui reste à trouver une fin. Optimiste, il programmera sûrement que grâce aux techniques de signalisation du voilier, on pourra les retrouver et les sauver ainsi que leurs amis. Encore un peu de courage, au travail, il faut conclure cette aventure et faire en sorte qu’elle reste vraisemblable.

 

29 janvier 2016

A Sainte-Hélène

Par Zabeth STEPAN

Printemps 1820, Longwood House, austère bâtiment battu par les alizés sur un promontoire de l’île Sainte-Hélène. Napoléon réside depuis cinq ans déjà sur cette île perdue au milieu de l’Atlantique sud, à quelques 2 000 kilomètres des côtes africalongwoodines. Les Anglais, auxquels il s’est rendu après la déroute de Waterloo, l’y ont exilé, presque au bout du monde, pour ne pas risquer  de nouveau un retour de ce Corse diabolique.

Ce matin, le monarque déchu attend la visite de Sir Hudson Lowe, le geôlier intraitable qui lui a été assigné et qui lui rend la vie impossible.

Le voici qui entre. Napoléon l’interpelle assez sèchement, il ne supporte pas l’arrogance de son gardien mais doit lui adresser une requête :

«  Monsieur, mon médecin, François Antonmarchi, me conseille de prendre plus d’activité physique. »

La réponse de Lowe tombe tel un couperet :

« De l’activité physique ? C’est pourtant vous, Bonaparte, qui refusez de sortir pour ne pas vous exposer aux regards… »

La réplique du prisonnier claque :

« Moi, refuser ! Comment osez-vous ? Depuis votre prise de fonction, toutes choses me sont restreintes, mon courrier, mes lectures, mes visites, mes promenades sans surveillance. 

En effet, martèle son interlocuteur, j’ai des ordres pour cela.

Des ordres ! Pas seulement, vous êtes pointilleux, rigide, on aurait pu difficilement trouver mieux pour occuper votre fonction. Que craignez-vous donc ? »

Hudson Lowe ne répond pas. Il a appris à se méfier de Napoléon, ce militaire comme lui qui, au cours de son bref règne, s’est imposé comme un éminent stratège. Il en a gagné des victoires contre les rois de l’Europe : Austerlitz, Iéna, Friedland, Wagram…Il a bien sûr, été informé par ses supérieurs de la puissance que ce conquistador a développée au cours de ses quelques années d’imperator. Malgré tout, un sourire narquois étire ses lèvres, il y a eu aussi des défaites : Trafalgar, la Bérézina, et surtout la dernière, Waterloo…

Il ricane

« C’est évident, je suis l’homme de l’emploi, mais  beaucoup moins méfiant que vous le pensez. Cette fois-ci, vous ne risquez pas de jouer la fille de l’air. Vous ne reproduirez pas votre exploit de l’île d’Elbe. Vous ne pourrez plus nuire au repos du monde. »

Un peu pris de court, Napoléon reste coi. Il pense à ce que vient de lui rappeler Hudson Lowe. Un magnifique souvenir vraiment !

Quitter l’île italienne, débarquer en Provence, remonter vers Paris en suivant cette route qui depuis porte son nom, c’est inoubliable !  Redevenir pour Cent Jours Napoléon ier ! Il occulte la fin, cette terrible défaite, ce « Waterloo, morne plaine, comme une onde qui bout dans une urne trop pleine » comme l’écrira Victor Hugo plus tard. Et maintenant, se trouver là, et dans quel état ! Il faut qu’il se reprenne, son geôlier ne doit pas gagner. Plus calme, il s’adresse de nouveau à son vis-à-vis :

« Monsieur Antommarchi pense que des travaux de jardinage me seraient bénéfiques. Je pourrai aménager les alentours et créer un muret de gazon qui me permettrait de me promener sans être vu. Puis-je avoir votre accord ? »

Le gardien, un peu décontenancé par ce revirement ne trouve pas d’argument pour étayer un refus et répond d’un ton moqueur :

« Si vous pensez que votre santé précaire vous le permet,… faites, faites… Ce me sera un spectacle assez divertissant que de voir un empereur, enfin, ce qu’il en reste, s’adonner à un tel labeur. »

Il rit, mais qu’importe ce ricanement ? Bonaparte sait que cela va le distraire un moment. Il se rend bien compte de la situation. Aucune illusion quant à son avenir. Il n’a plus d’espoir, il ne reçoit plus de nouvelles de Joséphine, de son épouse et de son fils, l’Aiglon qu’il ne verra plus jamais. En outre, sa santé de plus en plus précaire, les douleurs qui le terrassent par moments ne lui laissent, hélas, pas beaucoup de temps.

D’un simple hochement de tête, il remercie le gouverneur anglais et le congédie ; pas de familiarité, juste de la condescendance ; le gardien tourne les talons et quitte la pièce, abandonnant l’illustre prisonnier à sa solitude.

L’avenir a montré que cette activité lui a été pour un temps salutaire, mais pour fort peu de temps. L’empereur s’est affaibli, la maladie et la tristesse l’ont épuisé.

Le sinistre Hudson Napoleon-depicted-at-LongwoodLowe est resté son garde chiourme jusqu’à la fin, le 5 mai 1821. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’il lui a rendu un bref hommage. Celui-ci mérite d’être rapporté :

« Hé bien, Messieurs, c’était le plus grand ennemi de l’Angleterre et le mien aussi, mais je lui pardonne tout. A la mort d’un si grand homme, on ne doit éprouver qu’une grande douleur et de profonds regrets. »

Est-ce qu’il a su que les cendres de Napoléon ont été ramenées en France en 1840 en grande pompe ?

Combien de visiteurs sont venus depuis aux Invalides s’incliner devant sa dépouille ? Ont-ils pardonné les guerres et les morts ? Ont-ils oublié les années passées à Sainte-Hélène ? N’est-il pas devenu un des grands personnages de notre Histoire ?

 

 

 

 

 

7 janvier 2016

La statue africaine

statue-cultuelle-luba-rdc-zaire-statue-africainesMarie-Claude Miollan -

Je mesure un mètre de haut. Je suis faite en bois massif de couleur sombre. Debout, bien stable sur mes deux jambes, je porte quelque chose qui ressemble à une petite jupe plissée ceinturée à la taille. Mais peut être est ce une jupe traditionnelle en fibres de coco. Mes seins nus pendent légèrement sur mon ventre pointu. Des bracelets ornent le haut de mes bras, tandis que je porte dans mes mains deux objets ou deux êtres que même aujourd’hui je ne saurais définir. De forme allongée, comme un corps avec une tête qui se dessine à son extrémité. J’ai un long cou surmonté d’une tête aux traits marqués par un nez et des sourcils saillants, une bouche aux lèvres charnues, un regard qui fixe un point juste devant moi. Je possède aussi deux oreilles très allongées et sur la tête des tresses qui se terminent par une courte queue. Sous mon menton j’ai un appendice qui ressemble à une langue qui d’ailleurs ne me plait pas. Alors, qui suis-je ?

 

Je suis une statue africaine, crée au Congo par un sculpteur africain bien sûr. Un colon français amateur d’art, passant dans un village non loin de Brazzaville s’arrêta dans son atelier, il m’aperçut et m’acheta. Je vécu chez lui un moment, puis il rentra en France et m’emmena. Je trouvais une place dans une maison où à coté des sculptures africaines on trouvait des meubles bretons et des peintures et sculptures réalisées par le colon lui-même. Mais tout à une fin, je fus finalement donnée en héritage à une fille de la maison qui prit soin de moi.

Elle me huila, me cira, m’épousseta et me trouva elle aussi une place tout à coté d’une défense d’éléphant venant elle de l’Oubangui Chari. J’y suis encore. Nous nous entendons fort bien toutes deux. Nous évoquons parfois nos souvenirs africains, mais le quotidien est quelques fois plein de surprises. En voici un exemple : La famille où je vis recevant ses petits enfants de trois et six ans, craignant sans doute qu’ils ne me bousculent en jouant me cachât dans un placard. Il y faisait un peu sombre certes mais j’étais tranquille. J’entendais leurs éclats de rire, leurs cris, leurs chamailleries dans le lointain. Un jour, alors qu’ils jouaient sans doute à cache-cache, l’enfant de trois ans, qui s’appelle, je le sais maintenant, Honoré, en cherchant sa sœur Ambre ouvrit la porte du placard et me vit.

Que crut-il voir, un monstre, un fantôme ? Quoi qu’il en soit il refermât vivement la porte et couru voir sa sœur.

Quelques instants après on vint me sortir de ma cachette. Je fus remise à ma place habituelle. On me regarda, on m’admira, on m’ausculta même et on raconta en détails mon histoire aux enfants.

Depuis, chaque fois qu’ils viennent en vacances ils ne manquent pas de venir me présenter leurs hommages en me caressant doucement la tète en faisant attention à ne pas me bousculer par crainte de me faire tomber. Mais se pose toujours la question de savoir ce que je porte au bout de mes bras. Je ne peux leur répondre, bien sûr, je l’ignore moi-même.

 

19 décembre 2015

Coup de foudre sous une tempête de neige

Liliane Fainsilber -

 

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A cause d'une soudaine tempête de neige, nous nous sommes trouvés pris au piège, avec quelques autres automobilistes, sur une petite route de montagne, sans aucune maison à des kilomètres à la ronde. La nuit commençait à tomber et il faisait déjà très froid. Chacun sortit de sa voiture et essaya de s'organiser au mieux pour la nuit. Par chance un grand tas de bois coupé par les cantonniers se trouvait à proximité. Nos deux adolescents, Romain et Julien, furent tout heureux de faire un grand feu pour pouvoir se réchauffer. Ceux qui en avaient sortirent de leurs bagages quelques provisions et on s'aperçut donc que, sans faire un grand festin, la nourriture mise en commun serait amplement suffisante. C'est ainsi qu'à plusieurs familles jusqu'à ce jour inconnues l'une de l'autre, nous avons eu une très belle veillée au clair de lune, car le ciel était maintenant dégagé et plein d'étoiles. Dans l'une des voitures, une charmante jeune fille voyageait avec ses parents, elle devait avoir quinze ou seize ans. Elle semblait très timide mais au cours de la soirée, elle s'enhardit même jusqu'à parler un peu avec mes deux fils. Ils échangèrent quelques opinions sur leurs préférences musicales, se découvrirent une passion commune pour Ibrahim Malouf et Grand-corps-malade et firent plus ample connaissance, en discutant de leurs études communes.

Au moment de se réfugier dans les voitures pour tenter d'y dormir, l'un d'entre nous découvrit dans l'obscurité à une vingtaine de mètres de la route, une grange sans doute abandonnée. Poussant la lourde porte de bois, il vit qu'elle était remplie de foin et ferait donc un confortable abri. C'est donc là que nous décidâmes de nous installer. C'est ainsi que certains évoquèrent de merveilleux souvenirs d'enfance et de jeunesse, parmi eux, des souvenirs de voyages en auto-stop et de nuits à la belle étoile, la bonne odeur du foin dans les granges et la chanson de Mireille, « couchés dans le foin avec le soleil pour témoin, un petit oiseau qui chante au loin... »

Au petit matin, nous avions tous plein de foin dans les cheveux et les vêtements froissés mais nous avions très bien dormi.

Les déblayeuses, qui étaient maintenant arrivées du village voisin, entrèrent en action et dégagèrent la route.

Or au moment de tous nous séparer un peu à regret, un homme de belle prestance, cheveux poivre et sel, qui s'était présenté sous le nom d'Antoine de Poggioli, s'avança vers Florence, une des jeunes femmes auprès de qui il avait passé la soirée, il l'entraîna un peu à l'écart du groupe et lui dit qu'il aimerait bien la revoir.

On sait que les obstacles mis au développement d'une passion ne servent qu'à lui donner plus de force, mais encore faut-il qu'ils puissent être franchis. Nous qui étions ainsi devenus les témoins de la naissance de cette idylle, nous nous demandions tous si ce coup de foudre sous une tempête de neige pourrait avoir une suite. En effet Antoine de Poggioli était conseiller en communication auprès de l’Élysée, tandis que Florence, bergère moderne, gardait ses moutons sur les hauts plateaux du Larzac et faisait du fromage avec le lait de ses brebis. Est-ce toujours vrai que les princes, même de pacotille, épousent toujours des bergères ? Cela dépend des circonstances mais aussi du désir de ces dernières, et Florence, la jolie bergère du Larzac n'avait pas encore dit son dernier mot. Dirait-elle oui ?

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Deux ans après, ceux qui passaient le samedi sur le marché de Lodève pouvait discuter de vive-voix avec l'ancien conseiller en communication de l’Élysée. Celui-ci avait en effet abandonné à jamais ses coûteux costumes trois pièces et vendait désormais ses fromages auprès de sa jeune et charmante épouse. Il savait maintenant ce qu'était la vraie vie et tout cela à cause d'une tempête de neige.

 

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Mais ce qu'on sait moins c'est que depuis que son conseiller en communication l'a abandonné pour devenir berger, le président de la république n'a pas en effet réussi à justifier la vertigineuse ascension de la courbe du chômage et il ne pourra donc pas se représenter comme il l'a promis. Tout çela est donc la faute de la jolie bergère du Larzac dont Antoine est tombé amoureux. Comme le rappelle le proverbe «  A petite cause, grands effets ».

 

 

 

18 décembre 2015

Clairvoyance

Liliane Fainsilber - 

 

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A la gare de Bruxelles, Aurélie sauta dans le train qui la ramenait vers Paris. Elle n'avait pas eu le temps d'acheter des journaux et se trouvait un peu désœuvrée. Elle jeta un coup d'oeil sur la tablette de son voisin. Il avait étalé quelques fiches et elle vit surtout sur l'écran de son ordinateur la reproduction d'un tableau de Magritte qu'elle ne connaissait pas. Le peintre avait disposé sur une table son modèle, un œuf, sur sa toile il avait figuré un oiseau aux larges ailes prenant son envol. Comme elle savait que les titres de ses tableaux avait toujours beaucoup d'importance même s'ils paraissaient souvent être sans lien avec eux, elle demanda à ce jeune homme son titre. C'était l'occasion de nouer connaissance et d'engager la conversation. Tandis qu'il lui répondait elle se tourna vers lui et découvrit un grand gaillard, à la barbe et la chevelure un peu hirsute. Il se présenta : «  Aurélien ! ». Malgré la chaleur du wagon, il avait gardé un gros pull de laine rêche sans doute tricoté à la main. Il lui faisait penser à un de ses soixante-huitards un peu passés de mode maintenant. Il était étudiant aux Beaux-arts et préparait un mémoire sur Magritte et le surréalisme, il se montra enchanté de pouvoir en discuter avec sa compagne de voyage. Oui, ce tableau s'appelait « Clairvoyance » et évoquait en effet toute l'essence du surréalisme dans cet énigmatique trio, l'oeuf, comme modèle, l'oiseau comme sa représentation, et le titre qui constituait l'interprétation du peintre. Il souhaitait en effet voir clair au-delà de la réalité de l'objet, en révélant son mystère sous la forme de cet oiseau qui s'envolait à tire d'aile échappant à jamais au regard. Comme elle se sentait en sympathie avec lui elle lui posa quelques autres questions sur son étude et lui confia à quel point un autre des tableaux de Magritte provoquait pour elle un sentiment d'inquiétante étrangeté à la limite de l'angoisse. Il s'agissait de celui qui s'appelle la reproduction interdite. Un homme vu de dos se regarde dans un miroir mais au lieu de se voir de face, comme on ne pourrait que si attendre, il se voit de dos.

not-to-be-reproducedC'est ce miroir maléfique qui lui renvoie cette image insolite. Mais ce spécialiste en herbe de Magritte ne put lui en dire plus si ce n'est qu'une reproduction interdite n'était pas la même chose qu'une reproduction impossible et se posait la question de savoir quel était l'agent interdicteur. Quelle instance avait empêché cet homme de se regarder en face et de se tourner ainsi le dos ? Au milieu de cette sérieuse discussion, il commencèrent à apercevoir les tristes pavillons de banlieue de la région parisienne, le voyage avait passé si vite ! Ils eurent la claire vision du fait qu'ils seraient bientôt séparés mais peut-être aussi la clairvoyance du destin qui les attendaient et vite ils échangèrent leurs numéros de téléphone pour être sûrs de pouvoir se revoir.

18 octobre 2015

Une héroïne au temps des plantations

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Zabeth Stépan -

SCARLETT O’HARA

 

La drôle de petite bonne femme que voici. Un personnage mutin, parfois adorable, parfois exaspérant.

Tout est là, énervant. Un monde de frivolité, un babil incessant de coquette, des exigences capricieuses.

Tout se remarque, éblouissant. Une légèreté dansante dans ses mouvements, un teint de lis et de roses, des sourires ensorcelants à damner un saint.

Sa beauté éclatante resplendit, elle rayonne dans les pièces meublées sombrement de Tara et les illumine. D’ailleurs elle en est consciente et à chaque réception dans les demeures des riches planteurs de Virginie, une cour de jeunes gens l’entoure et lui permet de briller. Quel bonheur d’être la plus belle, la plus courtisée !

Joueuse et sûre de son chafrivolerme, elle sait se montrer câline, enjôleuse et s’en sert habilement pour arriver à ses fins.

Taratata ! Taratata ! C’est ainsi qu’avec son caractère explosif, elle ponctue énergiquement toutes les affirmations qu’elle profère, les désirs qu’elle manifeste et qui ne sauraient lui être refusés.

Egoïste, sûrement, égocentrique plutôt, elle se sent importante, forte et ne pourrait admettre de ne pas occuper le devant de la scène, au détriment des autres dont fait partie la douce Mélanie. 

Je l’ai découverte dans le roman « Autant en emporte le vent » puis dans le film tiré de cette œuvre de Margaret Mitchell. Au début, j’ai été  attirée, séduite par cette magnifique demoiselle, puis d’autres sentiments se sont faits jour.

De l’amusement et de l’ironie d’abord. Petite écervelée qui ne pense qu’à elle, qui, imbue de sa personne se montre assez ridicule dans son acharnement à conquérir celui qui ne la veut pas. Ah ! Ashley, si pâle, si fade qu’elle n’aurait aucun mal à le dominer, mais qui doit avoir certainement peur de cette fougue, de ce tempérament violemment exubérant…Tant pis pour lui s’il lui préfère Mélanie. Quant à Scarlett, elle ne se résigne pas et jalouse, pour se venger, épouse un quelconque benêt. Celui-ci aura l’élégance de ne survivre que peu de temps pendant la guerre de Sécession.

De l’agacement ensuite. Capricieuse, elle ne sait voir, comprendre et apprécier le flambeur qui lui ressemble et en ferait la reine de La Nouvelle Orléans. C’est elle qui ne veut pas se l’avouer et doit craindre Reth, l’homme viril et fort dont elle ne pourrait se rendre maîtresse. Aveuglement et sottise  lui cachent les sentiments passionnés qu’il éprouve pour elle.

Plus tard, de l’admiration. Sa vaillance, son énergie pour retrouver son cher domaine, sauver ses gens. 

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Dure, âpre, elle n’a pas peur de la guerre, des dangers, des soldats errants. Dans l’adversité, elle sait se montrer la plus forte, celle qui sait pour un moment oublier les frivolités et les caprices pour aller à l’essentiel.

Au fil des pages, malgré la belle vie qui est la sienne, en moi je sens poindre la tristesse. Les chagrins de la vie l’atteignent, la bouleversent. Malgré tout, les mêmes sentiments, les mêmes comportements surgissent toujours. Elle n’avancera donc jamais vers la clairvoyance et la sérénité ?

Er pour finir, la déception et l’inquiétude me gagnent. Petite coquette finalement assagie, enfin peut-être assagie, pourra-t-elle devenir lucide et raisonnable ?

Hélas ! Trop tard ! Le happy end ne sera pas pour toi, Scarlett, te voici seule dans ton cher Tara. Cependant, de plus, même dans cette circonstance, tu ne changes pas. Les larmes qui inondent ton beau visage sont plus de rage que de chagrin. Echec final…

Je referme le livre, les lumières se rallument. Et j’avoue ressentir tout de même de la tendresse pour cette femme, affranchie et libre, si féminine et si féministe…

 

illustrations : photos du film de Victor Fleming (1939)

 

  

 

 

10 octobre 2015

Epuisée, elle se laissait couler

 

 Liliane Fainsilber -  

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Ils avaient embarqués sur la côte libyenne. Il y avait maintenant deux jours et deux nuits. Au cours de cette dernière nuit, un autre bateau les avait rejoints et les passeurs, qui jusqu'alors avaient tenu la barre, les abandonnèrent à leur sort, sans eau, sans nourriture et sans essence. Ils étaient en vue de la côte sicilienne, elle ne leur semblait pas si loin, mais désormais ils n'avaient plus aucun moyen de la rejoindre, faute de pouvoir gouverner la bateau qui était devenu la proie des vagues et des vents. En ce mois de Juillet, il faisait chaud et la soif se faisait terrible. Nour nourrissait encore sa petite fille âgée de deux mois, mais, sous le coup de toutes ses épreuves, elle n'avait plus de lait. L'enfant gémissait plus qu'il ne pleurait et c'était pitié que de l'entendre. A côté d'elle, son fils aîné, le petit Ibrahim, âgé d'à peine sept ans, restait prostré. Au moment du départ, son mari et elle avaient été séparés. Il avait du monter sur un autre bateau et elle se demandait comment ils pourraient se retrouver si toutefois ils arrivaient un jour à bon port.

Après un grand moment de désarroi, parmi ceux qui se trouvaient sur le bateau, un homme pris la direction des opérations. Il proposa d'essayer de se rapprocher le plus possible des côtes pour pouvoir avoir quelque chance d'être secouru. Il demanda d'abord quels étaient ceux des passagers qui savaient nager. Il y en avait, heureusement quelques-uns. Ceux-là eurent pour mission de se mettre à l'eau par groupe de quatre pour pousser le bateau en nageant. Parmi ceux qui restaient à bord, il désigna quelqu'un pour tenir fermement la barre. Avec quelques chemises il tenta même de constituer des voiles qui auraient pu prendre le vent, mais ce qui manquait c'était la possibilité de faire des mâts efficaces pour ces voiles improvisées.

 

Petit à petit, ils se rapprochèrent de la terre, mais ils échouèrent sur un haut fond et le bateau lourdement chargé ne résista pas au choc. Il prenait l'eau et il fallait maintenant rejoindre la côte à la nage. Un des hommes prit soin d'Ibrahim et Nour se lança à l'eau en tenant dans ses bras son bébé. Elle était embarrassée par ses vêtements qui imbibés d'eau étaient devenus très lourds et l'entraînaient vers le fond. Elle s'accrocha à une planche, ce qui lui permit au moins un temps de rester à flot. Son bébé pleurait car il commençait à avoir froid. Epuisée, elle allait se laissa couler quand soudain une main robuste la rattrapa et une voix amicale la réconforta. C'est ainsi que pour la première fois, elle entendit celle qui deviendrait sa nouvelle langue, la langue de sa nouvelle vie, l'italien.

 

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25 septembre 2015

La belle prise de Mathurin

 Liliane Fainsilber -

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 Mathurin était un garçon solide. Il avait les deux pieds sur terre, aussi les gens du village furent très étonnés lorsqu'ils apprirent ce qui lui était arrivé.

 Comme chaque soir le pêcheur était parti en mer et comme chaque matin il avait ramené ses filets vides jusqu'au jour où il avait eu la surprise de découvrir au milieu d'un lit d'algue une magnifique ondine endormie. Il avait d'abord cru que c'était une sirène mais son corps ne se prolongeait pas par une queue de poisson. Prise dans son filet, tandis qu'elle se réveillait, il vit en effet deux jolis petits pieds dépasser des plis de sa robe blanche. Elle semblait être à peine sortie de l'adolescence.

 Toute étonnée de se retrouver ainsi entortillée dans les filets du pêcheur sur le pont de cette barque, au milieu des varechs et des restes de coquillages, quand elle fut un peu réchauffée au soleil, elle s'ébroua et lui demanda en breton car elle ne semblait pas savoir parler le français, comment il s'appelait et où il habitait. C'est ainsi qu'ils firent connaissance. Comme elle s'était perdue en mer, il lui proposa de la ramener à terre et même de l'héberger chez lui, en se demandant cependant, ce que pourrait en dire sa femme.

 

Chemin faisant, installée à la proue de sa barque elle lui raconta en quelles circonstances elle s'était retrouvée nageant en pleine mer. Elle lui expliqua qu'à l'inverse des sirènes, les ondines sont des créatures qui vivent plutôt près des lacs, des rivières et des fontaines. Elles préfèrent donc l'eau douce à l'eau de mer. Elle vivait, avec toute sa famille près de l'église de Tonquedec, auprès de sa très vieille fontaine et de son calvaire breton. C'était ainsi qu'elle avait pu apprendre la langue des humains, lorsque les paroissiens venaient à la messe du dimanche et surtout pour le grand pardon de la Saint Tonquedec. Mais cette petite ondine s'était sentie tellement à l'étroit dans cet enclos breton qu'un jour elle avait échappé à l'attention de sa famille et, de lacs en rivières et en ruisseaux, était parvenue jusqu'à la mer. De fait, Mathurin pensait qu'elle ne lui avait peut-être pas dit toute la vérité. Il supposait donc que, comme la petite sirène d'Andersen, elle était tombée amoureuse d'un humain et était partie à sa recherche de par les océans. Fugitivement, il regretta d'être trop vieux, pour profiter de cette belle rencontre. Il soupira et rentra sagement au port avec sa belle prise qui s'évapora lentement dans les voiles de brume du petit matin. 

 

 

 

 

 

 

 

9 juin 2019

Hamlet et Ophélie, aujourd'hui...

 Liliane Fainsilber 

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Quand l'histoire commence, Ophélie est tancée par son grand frère, Laertes, qui se croit autorisé à s'occuper de sa vie privée. Il vient en effet de découvrir que sa sœur est amoureuse d'Hamlet et il lui enjoint de ne tenir aucun compte de tout ce qu'il pourrait lui raconter. Ce ne peut être, selon lui, que des billevesées.

Il insiste lourdement : Ce jeune homme n'est pas pour elle, il sera appelé à de hautes fonctions, Il est en effet Prince du Danemark : «peut-être vous aime-t-il aujourd'hui ; peut-être aucune souillure, aucune déloyauté ne ternit-elle la vertu de ses désirs mais vous devez craindre, en considérant sa grandeur, que sa volonté de ne soit pas à lui ; En effet il est lui-même le sujet de sa naissance. Il ne lui ai pas permis comme aux gens sans valeur, de décider pour lui-même. Car de son choix dépendent le salut et la santé de tout l'état. »

Il ne peut donc qu'inciter sa sœur à protéger sa vertu : « Prenez y garde, Ophélia, prenez-y garde ma chère sœur, et tenez-vous en arrière de votre affection, hors de la portée de ses dangereux désirs ».

 

Devant un tel discours, Ophélie, celle du temps de Shakespeare, ne s'est pas révoltée mais a quand même rétorqué à son frère qu'il était assez inconséquent dans sa propre conduite, écrasant toutes les fragiles primevères qu'il rencontrait sur son chemin : « Mais vous, cher frère, ne faites pas comme ce pasteur impie qui indique une route escarpée et épineuse vers le ciel, tandis que lui-même, libertin repu et impudent, foule les primevères du sentier de la licence, sans se soucie de ses propres sermons. »

 

Dans cette même scène surgit, Polonius, son père, qui redouble les recommandations du grand frère : « Désormais, ma fille, soyez un peu plus avare de votre virginale présence[...]Quant au seigneur Hamlet, ce que vous devez penser de lui, c'est qu'il est jeune et qu'il a, pour ses écarts, la corde plus large que vous. En un mot, Ophélia, ne vous fiez pas à ses serments ; car ils sont non les interprètes de l'intention qui se montre sous les vêtements, mais les entremetteurs des désirs sacrilèges, qui ne profèrent tant de saintes et pieuses promesses que pour mieux tromper ». Il lui ordonne fermement de repousser son amour. On le constate, la perte éventuelle de la virginité d'Ophélie préoccupe au plus au point les mâles de cette famille.

 

L'Ophélie d'aujourd'hui, danoise moderne, élégante et court vêtue, ne s'est pas contenté, en répondant à son frère, de lui reprocher sa conduite mais l'a vertement envoyé promener lui suggérant de s'occuper de ses propres affaires. Elle entend bien mener sa vie à sa guise. Il en va de même, lorsque son père, Polonius, lui enjoint aussi de repousser Hamlet, de le décourager dans les manifestations de son amour, elle est bien décidée à ne tenir aucun compte de ses injonctions.

 

Si bien que, lorsque Hamlet très perturbé, comme en proie à un délire, vient la voir pour lui raconter l'épouvantable cauchemar qu'il a fait la nuit précédente, elle l'écoute avec beaucoup d'attention et essaie de le rassurer en le prenant dans ses bras pour le consoler, tel un enfant fragile.

Petit à petit, Hamlet peut alors lui décrire ce qu'il a rêvé.

Sur le coup de minuit, le fantôme de son père est venu à sa rencontre et lui a révélé que son oncle, celui qui vient juste d'épouser sa mère, l'a, en fait, assassiné pour prendre sa place, en tant que roi et en tant qu'époux, en lui versant une fiole de poison dans l'oreille tandis qu'il dormait. A ses yeux, ce crime ne peut rester impuni et donc Hamlet, son fils, se doit de réaliser cette vengeance. C'est pour le charger de cette mission qu'il est revenu du royaume des ombres. Hamlet, comme fou, est poursuivi par cette vision d'horreur.

Comment Ophélie pourrait-elle l'aider ?

Elle a certes lu Freud en classe de philosophie et elle s'intéresse beaucoup à l'interprétation des rêves, elle sait que même sous leur apparente absurdité, les rêves ont toujours un sens, mais elle n'a jamais appris à les interpréter.

Par contre elle a aussi gardé dans un coin de sa mémoire ce que ce grand psychanalyste, a découvert, le fait que, comme Oedipe, tout homme a un jour rêvé de coucher avec sa mère et de tuer son père. Elle se doute bien qu'Hamlet n'a pas échappé à ce destin et que de ce fait il se sent terriblement coupable d'avoir eu lui aussi un tel désir et que ce doit être la cause de son terrible cauchemar.

 

Ophélie pense donc qu' Hamlet a sur la conscience de terribles remords non seulement pour avoir éprouvé ces désirs de mort à l'égard de son père mais aussi à l'égard de son oncle qui maintenant en occupe la place.

Comment Ophélie pourrait-elle le tirer de là, que pourrait-elle lui dire ? Elle ne sait pas comment s'y prendre et faute de mieux lui demande de lui raconter à nouveau son rêve en lui recommandant de dire tout ce qui lui vient à l'idée à ce moment là.

Hamlet, en se remémorant la scène de sa rencontre avec le spectre de son père, réussit à lui dire petit à petit, à quel point il a été choqué par le fait que sa mère se soit remariée avec son beau-frère, si peu de temps après la mort de son premier mari et lui a surtout avoué qu'il aurait beaucoup aimé se venger lui-même de son oncle, tout autant que de venger son père, pour cette trahison.

Après un temps de silence, Ophélie, lui répond que même s'il en est offensé et qu'il lui en veut beaucoup, sa maman a quand même bien le droit de vivre sa vie et d'être heureuse en tant que femme avec son nouveau mari. Ce qu'elle souhaite pour elle-même également.

 

C'est ainsi que le drame d'Hamlet prend désormais une toute autre tournure grâce à son intervention décisive. Elle-même, grâce à l'amour qu'Hamlet lui porte, ne se noiera pas dans la rivière en essayant d'attraper des fleurs. Hamlet ne trucidera pas Polonius, caché derrière un rideau pour surveiller ce qu'il pourrait faire subir à sa mère. Laertes et Hamlet ne seront pas obligés de se battre à l'aide de leur épée empoisonnée. Ce dernier ne tuera pas le roi, et Gertude sa mère ne boira pas la coupe de poison. A la fin de la pièce, au lieu de ce grand carnage final de la tragédie shakespearienne, sept cadavres qui jonchent le sol, on pourra y célébrer à jamais les amours d'Hamlet et d'Ophélie. Mais il y a un grand perdant, dans cette nouvelle version de la tragédie, c'est le directeur de la compagnie qui la joue. Comme l'affirme le dicton, les gens heureux n'ont pas d'histoire et cette pièce de théâtre, sans son amoncellement de cadavres, désormais ne fait plus recette. C'est la faillite !

22 novembre 2015

SURPRISE

SURPRISE par René Stépan

Ce soir, Saint Valentin. Le repas en amoureux que nous avons concocté avec Sandra, ma compagne du moment, est prêt. Verrine de haricots verts, gnocchis bolognaise préparés par le traiteur italien de la rue, dessert croquant cuisiné par notre amie, prof de français sympa enseignant je ne sais où.

Table joliment décorée, nappe à fleurs, couverts en argent, musique de fond : Cécilia Bartoli et sa voix divine… Tout est en harmonie. Nous nous sommes même habillés pour la circonstance : costume trois pièces pour moi, robe de soirée pour Sandra, maquillage.

Les portables sont sur vibreur pour ne pas casser l’ambiance de la soirée. Seul l’avertisseur d’SMS  fonctionnera.

Après l’apéritif , las mises en bouche et  le champagne, nous entamons une succulente verrine aux haricots verts quand soudain, un SMS me prévient d’un message sur mon portable.

Que faire ? le lire ou l’ignorer ?

Sandra me dit :

« Lis-le donc ! »

Je lis donc le message. Celui-ci me propose de me rendre ce soir 20 heures au 12 de la rue du Petit Pont au restaurant «  Le Rendez-vous », sans aucune autre explication.

Interloqué mais curieux, je fais part à Sandra du message. Elle me dit :

« Vas-y ! Je t’attends si ce n’est pas trop long. Je vais bouquiner en musique ! »

Ma curiosité l’emporte : je me précipite à l’extérieur de chez nous.

La rue du Petit Pont n’est pas très loin de l’appartement : dix minutes à pied au maximum… et je connais bien le resto. Tout en marchant ,je me pose des tas de questions , me demandant qui pouvait bien me fixer un rendez-vous un jour comme ça dans ce resto .lJ’y arrive et entre….  Surprise ! Installé à une table centrale, mon voisin du dessus, Dominique, téléphone à la main, attend avec un grand sourire et un bouquet de roses.

«  Surpris ? C’est la Saint Valentin ! J’ai pensé déclarer mon attirance pour toi aujourd’hui ! »

Je ne sais pas quoi dire, mais je ressens un certain plaisir ….

Sur ces paroles, je m’assois à ses côtés et lui répond, tout ému:

« En effet, moi aussi, cela fait longtemps que je voulais te parler ! Et je ne savais pas comment trouver l’occasion. »

L’occasion faisant le larron, nous nous prenons la main, parlons de tout et de rien, commandons du champagne puis nous embrassons longuement après avoir bien conversé, le serveur en ayant vu et entendu d’autres, et décidons de fêter cette rencontre inattendue à notre manière…

Resto, puis chez Dominique, lumière tamisée, musique douce, etc…

Sandra pourra lire son bouquin jusqu’au bout et laisser finir le CD…

Je précise que je n’ai jamais connu une telle situation !!!

 

SUITE ET FIN

Les premiers temps furent idylliques avec Dominique. C’était un garçon charmant, plein d’attentions à mon égard. Il n’oubliait jamais de m’offrir des fleurs ou des cadeaux pour des moments importants, fêtes ou anniversaires.

Au bout de quelque temps, j’ai commencé à me lasser de la relation homme- homme l, bien qu’elle fut considérée comme normale. C’est le jour où Dominique m’a proposé le mariage et l’adoption d’un enfant qui serait à nous deux que j’ai commencé à me détourner de lui. Non pas que j’étais opposé à ses propositions, mais l’avenir me gênait : couple de garçons mariés puis papa et maman d’un enfant. Que lui dire après ?

Et puis, Sandra me manquait à tous les points de vue : son odeur, sa féminité, nos étreintes, se façon de s’habiller, de se maquiller, de marcher, d’entrer à mon bras dans un restaurant, ses commentaires sur un fil ou une pièce de théâtre.

J’ai donc décidé d’en parler avec Dominique. Celui-ci a fort mal pris la chose :

« Comment, je pensais que nous nous aimions assez puissamment pour franchir les caps du mariage et de l’adoption d’un enfant… Mais si tu préfères une femme, je m’incline… »

Je ne savais pas quoi répondre, mais ma décision, longue à prendre, était définitive : je romprai avec Dominique et essaierait de reconquérir le cœur de Sandra ou d’une autre.

Les plus belles histoires d’amour ont donc une fin, mais je suis persuadé que Dominique trouvera  chaussure à son  pied pour accomplir ses rêves !...

 

 

 

 

10 février 2016

Hans et jean

par René STEPAN

Nous sommes le 25 décembre 1917, donc le jour de Noël. Après avoir échangé de nombreux coups de feu, jets de grenades et incursions stériles dans les lignes adverses, les commandants des deux camps ont décidé une trêve, la trêve de Noël, célébrée en France mais aussi en Allemagne. Cette trêve consiste d’abord en un match de football France-Allemagne. De nombreux coups irréguliers sont échangés surtout au début et l’Allemagne gagne ce match 5 à 4.

 On dira plus tard que le foot-ball est un sport qui se pratique à 11 contre 11, mais que c’est toujours les allemands qui  gagnent…

Ensuite, un tournoi de cartes trouvées au fond des besaces va calmer les esprits et favorise  les sympathies. Car, bien sûr, ces jeunes gens se demandaient encore pourquoi ils s’entretuaient et surtout pourquoi ils étaient là, alors qu’ils auraient été mieux dans leurs familles, dans leurs fermes natales, autour d’un bon feu de cheminée et d’une table frugale – guerre oblige – entourés de jeunes enfants, certains étant les leurs.

Ce souvenir et ce besoin avaient généré de profondes sympathies entre les jeunes gens.

Parmi eux, deux jeunes recrues, Hans l’Allemand, grand blond musclé et Jean petit brun et mince. Tout semble les opposer ils parlent tous deux un mauvais français – pour l’un de brèves études à la faculté de Munich et pour l’autre peu de mots appris pendant les longues veillées dans la ferme paternelle en Alsace, près de Strasbourg.

Autour d’une bouteille d’eau de vie rescapée d’on ne sait où, ils discutaient longuement

«    Cette guerre, à quoi sert-elle ? demande le Français

- Certainement à engraisser nos politiciens, et à faire valoir nos chefs, bien planqués .

- Moi, j’ai l’impression de servir de chair à canon, dit Jean. C’est une drôle de guerre anticipe-t-il.

- Mais non, il s’agit de montrer que notre patrie est la plus forte ! Vous avez cru, avec votre esprit revanchard entretenu par vos maîtres d’école que vous appeliez les hussards noirs de la république jusque dans les campagnes les plus reculées, que cette guerre n’allait durer que quelques jours, au plus quelques semaines ; vous êtes partis « la fleur au fusil »,  mais nous  voilà plus forts que jamais !  répond Hans avec véhémence.

-Mais tout ce que nos instituteurs en blouse noire nous ont dit et fait chanter ????

-Balivernes que tout cela, l’Allemagne avec ses chefs prussiens est la plus forte !

-Et nous, on vous battra quand même !

-Ce qui n’a pas été le cas en70, aux dires de mon père, reprend  l’allemand.

La conversation prenant une tournure agressive, Hans calme le jeu :

«  Aujourd’hui, c’est Noël, et nous ne sommes que de simples soldats programmés pour se battre l’un contre l’autre. Ne gâchons pas ces moments privilégiés qui nous sont offerts.  Jean lève alors son verre d’eau de vie :

« A la santé du meilleur, dit-il, contrarié mais réconcilié avec l’Allemagne grâce aux paroles de Hans. »

La soirée dura longtemps, ponctuée de chants et d’embrassades.

Sur ce, le lendemain, ils continuèrent à se tirer dessus. L’histoire ne dit pas s’ils se sont sortis du bourbier de cette grande guerre, mais espérons pour eux qu’ils ont retrouvé leurs familles, leurs fermes et surtout leur sérénité.

 

Epilogue

 Pour compléter ce texte, voici quelques renseignements utiles indiquant quelque suite importante à cet évènement mondial :

*sur le plan professionnel :

 La  fin de cette guerre 1914-1918 a provoqué des retours dans les foyers difficiles : couples et familles défaites, gueules cassées… La façon de cultiver la terre n’est plus la même, certains soldats agriculteurs refusent de continuer leur métier dans des conditions difficiles qu’ils n’imaginaient pas et qu’ils ont découvertes au contact des autres plus chanceux… Fini donc de cultiver des parcelles inaccessibles et peu rentables.

* Sur le plan culturel :

Sans conteste, un rapprochement de l’élite intellectuelle s’est établi entre auteurs français et étrangers.

* Cet évènement a suscité de nombreuses créations récompensées :

Le roman «  Les croix de Bois » de Roland Dorgelès a obtenu le prix Femina en 1927.

Le roman « Au revoir là-haut » a obtenu le prix Goncourt 2013.

Les films « La grande illusion » et « Joyeux Noël » ont eux aussi été primés.

Sans parler des écrits et poèmes anonymes de soldats réfugiés dans leurs tranchéesainsi que des œuvres non citées et non moins importantes.

Hélas, l’esprit revanchard suite à la capitulation allemande signée à Rethondes dans un célèbre wagon de chemin de fer s’est manifesté avec la montée du nazisme et d’Hitler qui ont mené à la seconde guerre mondiale et aux atrocités découvertes à cette occasion…

* Sur le plan politique :

En 1920, la création de l’inefficace Société des Nations (SDN) qui devait contrôler les éventuels conflits entre les pays n’a pas servi à grand-chose ; la création de l’ONU a dû prendre le relais en 1945 avec l’efficacité que l’on connaît.

Les conflits en Europe sont toujours présents : chute des gouvernements de l’Est, conflit des Balkans etc…

Espérons que l’année 2016 apporte une solution à tout cela.

 

janvier 2016

 

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