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Atelier d'écriture de l'écoute-s'il-pleut
7 janvier 2016

La statue africaine

statue-cultuelle-luba-rdc-zaire-statue-africainesMarie-Claude Miollan -

Je mesure un mètre de haut. Je suis faite en bois massif de couleur sombre. Debout, bien stable sur mes deux jambes, je porte quelque chose qui ressemble à une petite jupe plissée ceinturée à la taille. Mais peut être est ce une jupe traditionnelle en fibres de coco. Mes seins nus pendent légèrement sur mon ventre pointu. Des bracelets ornent le haut de mes bras, tandis que je porte dans mes mains deux objets ou deux êtres que même aujourd’hui je ne saurais définir. De forme allongée, comme un corps avec une tête qui se dessine à son extrémité. J’ai un long cou surmonté d’une tête aux traits marqués par un nez et des sourcils saillants, une bouche aux lèvres charnues, un regard qui fixe un point juste devant moi. Je possède aussi deux oreilles très allongées et sur la tête des tresses qui se terminent par une courte queue. Sous mon menton j’ai un appendice qui ressemble à une langue qui d’ailleurs ne me plait pas. Alors, qui suis-je ?

 

Je suis une statue africaine, crée au Congo par un sculpteur africain bien sûr. Un colon français amateur d’art, passant dans un village non loin de Brazzaville s’arrêta dans son atelier, il m’aperçut et m’acheta. Je vécu chez lui un moment, puis il rentra en France et m’emmena. Je trouvais une place dans une maison où à coté des sculptures africaines on trouvait des meubles bretons et des peintures et sculptures réalisées par le colon lui-même. Mais tout à une fin, je fus finalement donnée en héritage à une fille de la maison qui prit soin de moi.

Elle me huila, me cira, m’épousseta et me trouva elle aussi une place tout à coté d’une défense d’éléphant venant elle de l’Oubangui Chari. J’y suis encore. Nous nous entendons fort bien toutes deux. Nous évoquons parfois nos souvenirs africains, mais le quotidien est quelques fois plein de surprises. En voici un exemple : La famille où je vis recevant ses petits enfants de trois et six ans, craignant sans doute qu’ils ne me bousculent en jouant me cachât dans un placard. Il y faisait un peu sombre certes mais j’étais tranquille. J’entendais leurs éclats de rire, leurs cris, leurs chamailleries dans le lointain. Un jour, alors qu’ils jouaient sans doute à cache-cache, l’enfant de trois ans, qui s’appelle, je le sais maintenant, Honoré, en cherchant sa sœur Ambre ouvrit la porte du placard et me vit.

Que crut-il voir, un monstre, un fantôme ? Quoi qu’il en soit il refermât vivement la porte et couru voir sa sœur.

Quelques instants après on vint me sortir de ma cachette. Je fus remise à ma place habituelle. On me regarda, on m’admira, on m’ausculta même et on raconta en détails mon histoire aux enfants.

Depuis, chaque fois qu’ils viennent en vacances ils ne manquent pas de venir me présenter leurs hommages en me caressant doucement la tète en faisant attention à ne pas me bousculer par crainte de me faire tomber. Mais se pose toujours la question de savoir ce que je porte au bout de mes bras. Je ne peux leur répondre, bien sûr, je l’ignore moi-même.

 

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  • L 'écoute-s'il-pleut est un moulin au bord d'une petite rivière qui fonctionne lorsqu'il pleut. Dans cet atelier,animé par Christelle Prévôt, nous attendons avec plaisir qu'il pleuve des mots en abondance, puisque ce sont eux qui alimentent nos textes.
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