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Atelier d'écriture de l'écoute-s'il-pleut

22 novembre 2015

SURPRISE

SURPRISE par René Stépan

Ce soir, Saint Valentin. Le repas en amoureux que nous avons concocté avec Sandra, ma compagne du moment, est prêt. Verrine de haricots verts, gnocchis bolognaise préparés par le traiteur italien de la rue, dessert croquant cuisiné par notre amie, prof de français sympa enseignant je ne sais où.

Table joliment décorée, nappe à fleurs, couverts en argent, musique de fond : Cécilia Bartoli et sa voix divine… Tout est en harmonie. Nous nous sommes même habillés pour la circonstance : costume trois pièces pour moi, robe de soirée pour Sandra, maquillage.

Les portables sont sur vibreur pour ne pas casser l’ambiance de la soirée. Seul l’avertisseur d’SMS  fonctionnera.

Après l’apéritif , las mises en bouche et  le champagne, nous entamons une succulente verrine aux haricots verts quand soudain, un SMS me prévient d’un message sur mon portable.

Que faire ? le lire ou l’ignorer ?

Sandra me dit :

« Lis-le donc ! »

Je lis donc le message. Celui-ci me propose de me rendre ce soir 20 heures au 12 de la rue du Petit Pont au restaurant «  Le Rendez-vous », sans aucune autre explication.

Interloqué mais curieux, je fais part à Sandra du message. Elle me dit :

« Vas-y ! Je t’attends si ce n’est pas trop long. Je vais bouquiner en musique ! »

Ma curiosité l’emporte : je me précipite à l’extérieur de chez nous.

La rue du Petit Pont n’est pas très loin de l’appartement : dix minutes à pied au maximum… et je connais bien le resto. Tout en marchant ,je me pose des tas de questions , me demandant qui pouvait bien me fixer un rendez-vous un jour comme ça dans ce resto .lJ’y arrive et entre….  Surprise ! Installé à une table centrale, mon voisin du dessus, Dominique, téléphone à la main, attend avec un grand sourire et un bouquet de roses.

«  Surpris ? C’est la Saint Valentin ! J’ai pensé déclarer mon attirance pour toi aujourd’hui ! »

Je ne sais pas quoi dire, mais je ressens un certain plaisir ….

Sur ces paroles, je m’assois à ses côtés et lui répond, tout ému:

« En effet, moi aussi, cela fait longtemps que je voulais te parler ! Et je ne savais pas comment trouver l’occasion. »

L’occasion faisant le larron, nous nous prenons la main, parlons de tout et de rien, commandons du champagne puis nous embrassons longuement après avoir bien conversé, le serveur en ayant vu et entendu d’autres, et décidons de fêter cette rencontre inattendue à notre manière…

Resto, puis chez Dominique, lumière tamisée, musique douce, etc…

Sandra pourra lire son bouquin jusqu’au bout et laisser finir le CD…

Je précise que je n’ai jamais connu une telle situation !!!

 

SUITE ET FIN

Les premiers temps furent idylliques avec Dominique. C’était un garçon charmant, plein d’attentions à mon égard. Il n’oubliait jamais de m’offrir des fleurs ou des cadeaux pour des moments importants, fêtes ou anniversaires.

Au bout de quelque temps, j’ai commencé à me lasser de la relation homme- homme l, bien qu’elle fut considérée comme normale. C’est le jour où Dominique m’a proposé le mariage et l’adoption d’un enfant qui serait à nous deux que j’ai commencé à me détourner de lui. Non pas que j’étais opposé à ses propositions, mais l’avenir me gênait : couple de garçons mariés puis papa et maman d’un enfant. Que lui dire après ?

Et puis, Sandra me manquait à tous les points de vue : son odeur, sa féminité, nos étreintes, se façon de s’habiller, de se maquiller, de marcher, d’entrer à mon bras dans un restaurant, ses commentaires sur un fil ou une pièce de théâtre.

J’ai donc décidé d’en parler avec Dominique. Celui-ci a fort mal pris la chose :

« Comment, je pensais que nous nous aimions assez puissamment pour franchir les caps du mariage et de l’adoption d’un enfant… Mais si tu préfères une femme, je m’incline… »

Je ne savais pas quoi répondre, mais ma décision, longue à prendre, était définitive : je romprai avec Dominique et essaierait de reconquérir le cœur de Sandra ou d’une autre.

Les plus belles histoires d’amour ont donc une fin, mais je suis persuadé que Dominique trouvera  chaussure à son  pied pour accomplir ses rêves !...

 

 

 

 

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20 novembre 2015

Buffles

Marie-Claude Miollan -

Buffles

-Oui…B..jour.

-Tu as l’air bizarre, tu te sens bien ?

-Euh ! Oui ! Hier soir en sortant du métro, déambulant sur le trottoir, j’ai croisé un troupeau de buffles.

-Intéressant, tu vas bien ?

-Moi, je vais bien, c’est eux qui ont eu peur, un chasseur à cheval armé d’un arc les poursuivait.

-De plus en plus intéressant !

-Mais attend, derrière les buffles, j’ai vu de mes yeux vus une famille d’éléphants arrachant et dévorant les arbres du jardin des Batignolles. Les enfants dans le parc les observaient de loin bien sur, tout comme moi.

-C’est tout ? Rien de plus ?

-Mais écoute-moi … C’est incroyable. Un léopard qui me suivait depuis un moment sans que je m’en aperçoive a tenté de m’empêcher de rentrer chez moi, je veux dire chez nous. Il était devant la porte, la gueule ouverte prêt à me sauter dessus et en même temps il me faisait des clins d’œil.

-De mieux en mieux, qu’as-tu fumé ce matin ?

-Arrête, il ne s’agit pas de cela. Je viens juste d’essayer de te raconter mon rêve de cette nuit.

 

 

 

 

 

19 novembre 2015

Souvenirs de vacances

Bernadette Zygart -

 

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Nous sommes début juillet dans les années 1948/1950... les vacances commencent et aujourd'hui c'est le départ... Les valises sont descendues, il règne au rez-de-chaussée une "ambiance", une effervescence uniques. 

Le soleil, la chaleur, les portes ouvertes, le décor est planté, tellement agréable !
Au dehors, dans la cour comme dans les environs, règne l'odeur de café torréfié dans le brûloir et le bruit dans la"boule" au gré de la rotation dans le fourneau ressemble au tintement  des maracas...Tout cela se cumule en souvenirs...
Quelques heures plus tard tout  le monde est prêt, le père conduit son épouse et leurs cinq enfants dans ce petit village de MARIAKERKE en Belgique près  d'Ostende. C'est  dans le petit cimetière que repose le peintre expressionniste James ENSOR.
La durée du trajet permet beaucoup d'échanges entre les voyageurs, rapports classiques entre parents et enfants, entre frères et soeurs  à propos de la vie quotidienne, des consignes et des promesses de toutes sortes. Le père ne fera que l'aller-retour, gardien de la maison et du magasin. Il reviendra les week-ends, parfois accompagné d'autres membres de la famille heureux de "voir la mer"
Le dimanche c'est la messe dans la petite église bondée. Une chaisière passe dans les rangs pour percevoir la redevance pour l'utilisation des chaises.
Le curé - qui parle français pour les touristes - remercie la chorale pour sa prestation tout en lui demandant de chanter plus vite !!
La petite dernière de la famille, celle qui nous intéresse, n'a au début qu'un seul compagnon de jeux, son frère, de 3ans 1/2 son aîné,  les autres aînés sont beaucoup plus âgés. Les deux plus jeunes s'entendent à merveille, lui déborde d'imagination, d'humour. Sur la plage ils construisent des barrages de sable dans les poches d'eau ménagées par  la  mer quand elle se retire, ou des châteaux de sable, avec l'espoir que la marée haute ne les détruise pas tout à fait.
Ils jouent aussi aux billes en élaborant un circuit de sable, avec des virages, des montées et descentes, des tunnels. Les baignades enfin sont le prétexte des jeux avec une bouée avec les aînés Leur mère,qui déteste l'eau, les surveille de loin, comme de près, leur intimant  de sortir dès qu'une vague leur caresse le haut des cuisses ;elle-même remonte sa jupe le plus haut possible dès que ses chevilles sont couvertes d'eau.
C'est une époque juste après guerre,le petit village porte encore les marques d'immeubles bombardés, effondrés. La petite fille regarde tout cela, quelque peu interrogative devant ces fenêtres sans vitres ni menuiseries, dans son regard soudain apeuré on peut lire la  tristesse des images qu'elle imagine à partir de ce  qu'elle voit ; elle ne dit rien et personne ne l'interroge ; son frère n'est pas dans son monde à ce moment là.. Cependant,demain, dans . les dunes, ils joueront autour du grand blaukhaus et sur les pistes en béton que des jeeps ou autres engins de guerre ont empruntées.  Elle sera infirmière de guerre et lui commandant
de troupes dans le jeu qu'il aura encore inventé.
Le soir après le repas, ensemble tous les quatre ils partent en promenade vers la plage, partageant le plaisir de la quiétude du soir : peu de monde sur le sable à marée basse, le coucher de soleil, le flux et le reflux des vagues qui invitent à la rêverie. Les deux jeunes enfants, infatigables, inventent d'autres jeux, recherche de coquillages, course de vitesse, allers et retours vers les aînés qu'ils entourent en riant, lesquels tentent de ramener le calme,avant de jouer à leur tour avec les petits.
Parfois un cavalier, ou plus, dans le couchant ajoutent à la poésie du lieu, à moins que ce ne soit un pêcheur de crevettes avec son filet.
Au cour de ce séjour "à l'étranger" ils devaient être déclarés auprès des services de Police locaux. Encore une occasion de fou-rires dans la salle d'attente, provoquant l'agacement de leur mère, déjà énervée par cette obligation administrative qu'elle trouvait inutile !
Souvenir aussi de la boulangerie-patisserie, sur le coin d'une rue, excellents produits dont  ces "sous" en chocolat entourés de papier doré ou argenté. Un peu plus loin c'était l'épicière "Georgette" que nous étions heureux de revoir chaque année avec sa façon d'appeler "vidange" le retour des bouteilles de limonade consignées.
Tout un passé qui resurgit, presque à la demande. Je l'avais un peu oublié et je regarde vivre cette petite fille, lui tenant la main et nous nous sourions.
11 novembre 2015

Les mots incertains

 Liliane Fainsilber -

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Il n’est pas facile d’être une petite fille de trois ou quatre ans et d’être obligée d’apprendre beaucoup de mots dont on n’a pas encore deviné à quoi ils servent. Ainsi l’autre jour je me trouvais devant la vitrine d’un marchand de glaces et je ne savais pas quel parfum choisir, tellement il y avait de couleurs de glace. Il y en avait une que j’aurais bien aimé avoir, elle avait une très belle couleur verte mais je n’étais pas très sûre de savoir comment elle s’appelait. C’était un nom comme moustache ou pistache et voilà que j’ai choisi le mauvais mot en disant "Je voudrais, s’il vous plait, une glace à la moustache". Tout le monde s’est moqué de moi, surtout mon petit copain Michel qui a un an de plus que moi et qui est tout fier de savoir déjà lire et écrire, alors que moi, je ne  sais pas encore. J’ai encore terriblement honte de les avoir fait rire à cause de cette glace à la moustache et je les ai tous détestés.

Il y a encore plein d’autres mots qui sont difficiles à comprendre et que les parents n’aiment pas tellement nous expliquer, c’est par exemple celui qui se trouve dans la prière qu’on récite le soir, après le notre père qui êtes aux cieux, celui du "Je vous salue Marie..." Il y a ce Jésus qui s’appelle le fruit de vos zentrailles. Je me demande bien quel est l’arbre qui s’appelle "zentraille" et quelle est cette sorte de fruit qui s’appelle Jésus. Je comprendrai peut-être mieux quand je serais grande et que je pourrais retrouver tous ces mots dans le dictionnaire. J’irais peut-être en rechercher d’autres, par exemple qu’est-ce que ça veut dire « être amoureux ». Je sais quand même un peu ce que ça veut dire car à l’école maternelle on chante souvent cette chanson «  Bonjour, Guillaume, as-tu bien déjeuné ? Oh, oui, Madame, j’ai mangé du pâté, du pâté d’alouettes, Guillaume et Guillaumette, chacun s’embrassera et Guillaume restera. Est-ce qu’être amoureux ce n’est pas  quand il y en a toujours un qui reste et qui est malheureux ?

 

Pour l’instant, je vais dans une petite école maternelle de mon quartier, parce que ma maman ne veut pas que j’aille à l’école communale de peur que j’apprenne trop de gros mots. Elle a tort d’avoir peur parce qu’en fait j’en connais déjà quelques uns, c’est même mon papa qui me les a appris. Il aime bien dire, par exemple, quand il est en colère «  Nom de dieu, de nom du dieu de nom de merde ». Pour ma petite sœur et pour moi, ce mot est interdit.  On a quand même  le droit de dire par exemple «  mer de Cannet »ou « Mer de Chine », mais ce n’est quand même pas aussi bien, ça ne fait pas autant de bien.

Quand je serais plus grande j’apprendrai plein de nouveaux mots dans les livres et dans le journal, par exemple celui du roi NABUCHODONOZOR, parce que je trouve que c’est un très beau mot et très long, et je saurais même les écrire sans faire de fautes d’orthographe.

10 novembre 2015

Panique au cirque

Bernadette Zygart -

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Elle referme tout doucement la porte du local sans faire de bruit afin de ne pas être repérée. Le piège est prêt, fonctionnera-t-il ?
Elle le souhaite ardemment même si, au fond, elle craint les conséquences de son geste, s'il réussit  trop bien.  Mais il est allé trop loin dans la trahison de leur amour, il faut qu'il paie !
Elle passe le long des cages où sont enfermés les fauves, de magnifiques lions qui, tout à l'heure, peut-être....elle frissonna...
C'est l'heure de la représentation ; elle ne tient plus en place, se montre agressive, agitée au moindre prétexte, ce qui lui vaut quelques
réflexions de ses collègues ;tout ce qu'il faut éviter pour ne pas attirer l'attention...
Vint le moment  où les cages sont montées sur la piste ; le dompteur laisse entrer les fauves au nombre de six. D'habitude ils sont quatre, que va-t-il se passer ?
Au moment où quatre des fauves sautent sur leur  tabouret respectif, les tablettes sabotées s'effondrent sous leur poids. Perdant l'équilibre et ne parvenant pas à le retrouver faute de savoir dégager leurs pattes de l'entrave, ils deviennent soudain de méchante humeur. Les deux derniers lions assistent à cette scène incongrue et ne comprenant pas ce qu'il se passe, semblent prendre la chose du mauvais côté. Ils sont aussitôt interpellés par d'autres dompteurs qui les guident  vers le couloir menant à leur cage.
Partagés entre l'effroi et l'hilarité, les spectateurs s'agitent sur leurs sièges. Que dire du dompteur à qui arrive cette mésaventure? Il n'y comprend rien, bien sûr, et cherche le moyen de calmer ses bêtes, dont le comportement l'inquiète. Ses collègues arrivent en force, munis de fusils avec seringue neutralisante. 
Les quatre fauves, endormis, sont dégagés de leur carcan et, se réveillant doucement, sont acheminés titubant vers leurs cages chacun leur tour...La représentation n'aura pas lieu ce soir là, remplacée par ce scénario d'un tout autre genre !..et sans doute pas à la gloire du dompteur.
Dissimulée par le rideau de scène, elle eut un soupir qui en disait long sur ce qu'elle pensait  de l'issue de l'aventure qu'elle avait imaginée juste un peu plus tragique...
Il faut préciser tout de même que le dompteur fut invité à "exercer ailleurs ses talents de clown". Il eut beau protester de son innocence, rien n'y fit.

 

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7 novembre 2015

Dialogue entre deux figuiers

Liliane Fainsilber -

 

 

 

2015-10-17 05

« Bonjour. Je suis un figuier sélectionné. J'ai été élevé avec beaucoup de soin dans une pépinière. Je donne beaucoup de figues. Une première fois au printemps ce sont celles qu'on appelle des figues-fleurs. Elles sont très fraîches et parfumées mais de texture fragile. Elles se conservent peu. On ne peut que les manger à mon ombre, sous le soleil printanier. L'été passé, au moment des vendanges, je donne une deuxième récolte, cette fois-ci, ces fruits sont de miel et déjà presque séchés sur l'arbre. La peau de mes figues comme tannée et résistante sous la dent, soit violette soit d'un beau vert clair, livre dans ce petit sac fermé et et résistant une sorte de pâte sucrée granuleuse, prémices des confitures qu'elle pourrait devenir sous les mains expertes de la mère de famille. »

 «  Je suis, quant à moi celui qu'on appelle dans la bible, le figuier stérile. Aucune figue ne daigne pousser entre mes larges feuilles. Je suis né dans un vieux mur de pierre, le long d'un chemin de terre où le mistral qui souffle souvent dans cette zone assez aride, fait s'élever des tourbillons de poussière. Entre deux pierres, j'ai réussi à glisser mes racines pour y trouver un peu de fraîcheur. J'ai lutté pied à pied pour survivre car l'eau est rare mais je suis endurant. Ainsi j'offre une ombre protectrice et rafraîchissante à tous les promeneurs mais aussi aux paysans qui viennent travailler leurs vignes. Quelques fois filles et garçons s'y donnent rendez-vous. Je profite ainsi de leurs dialogue amoureux et j'y enrichis mon vocabulaire. Depuis les années 1900, date approximative de ma naissance, les mots d'amour ont bien changé. De nos jours en effet, plutôt que de parler du coeur et de l'âme, les amoureux préfèrent d'autres parties du corps plus évocatrices. Mais ainsi grâce à eux, bien que sans descendance, je participe, par procuration, à la reproduction des humains, faute de pouvoir participer à celle des figuiers. On dit que je sublime.

 

 

7 novembre 2015

Le plat de châtaignes

Catherine Granjean -

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Voilà. Le saladier de châtaignes cuites est là, devant toi. Tu t'en régales des yeux et c'est tellement prometteur que tu attrapes un couteau. Tu attaques la première châtaigne, minutieusement, ça prend un certain temps, puis tu la bouffes. Pas mal. Bien, même. Vite une deuxième. Couteau, et déjà un peu moins de minutie. Tu essaies de gagner du temps sur l'épluchage. De fait, elle est moins bien épluchée. Tu la bouffes. A la quatrième ou cinquième châtaigne, tu tentes un truc : épluchage très partiel, puis tu presses sur la coquille avec les dents, pour faire sortir la chair dans ta bouche. Pas terrible. Tu reviens à l'épluchage minutieux. Attends. Encore de la peau là. Voilà. Bouffe. Couteau. Attends bon dieu. Attends encore, il reste de l'écorce. Bouffe. Une autre. Bien dodue. Prometteuse. Couteau. Attends. 6 passages pour retirer l'écorce. Bouffe. Et voilà comment tu t'enfiles une moitié de saladier de châtaignes, sans véritable sensation de satiété, et sans même vraiment savoir si tu as mangé ou pas.

4 novembre 2015

Tour de magie pour un génie

Bernadette Zygart -

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Le petit Génie s'était octroyé un jour de congé, lassé qu'il était de réaliser les souhaits des uns et des autres à longueur de jours et de nuits.

Les mains dans les poches il partit en sifflotant en direction de nulle part. La nature était belle en cette saison printanière et la lumière du soleil enivrante d'espoir et de bonheur. Il s'amusa à imaginer que ce petit groupe d'oiseaux, là-bas, l'invitait à le suivre : il partit dans la direction qu'ils semblaient lui indiquer et marcha jusqu'à une sorte de passage entre deux rochers ; là, ils s'envolèrent et il le franchit seul.
Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir un tout autre paysage que celui qu'il venait de quitter. La quiétude de  la campagne en éveil printanier avoir fait place à un paysage inconnu sur terre , peuplé d'engins spatiaux,de personnages en scaphandres et casqués qui semblaient ne pas l'avoir remarqué, poursuivant leurs tâches sans lui prêter attention. Le petit génie se demanda soudain, comment,lui, pouvait respirer sans casque !
Il eut conscience de se trouver dans un lieu insolite dont il aurait mieux valu qu'il s'éloigne. Il se retourna vers la sortie, mais où était-ce ?Il aurait juré qu'il lui suffisait de faire demi-tour, peine perdue.
Il tenta bien son pouvoir d'omni présence, mais là encore la magie n'opérait plus ; et s'il était devenu un simple mortel ? Alors, comment sortir de là ? Il commençait à s'inquiéter sérieusement de l'issue de son aventure ; parviendrait-il à trouver la sortie de cet  endroit dont il commençait à se demander s'iln'était pas l'objet de son imagination. Non, pourtant, il se sentait complètement réveillé et pleinement présent à ce lieu ;alors, où était l'erreur d'appréciation ? Quel lien avec l'extérieur où il évoluait habituellement ? Que s'était-il passé entre les deux rochers ? Qui étaient ces oiseaux qui l'avaient mené là ?  Imaginaire que tout cela ou étapes vers une révélation ?
Tout à coup il sentit une présence bienveillante à ses côtés. Il ne vit rien de particulier mais constata que ses craintes s'envolaient ; il fut comme invité à évoluer un peu dans ce lieu inconnu. Chaque "scaphandrier" retira son casque et il reconnut nombre de ceux qui l'accaparaient jours et nuits, responsables de sa lassitude passagère.
                              
Quel soulagement à l'idée de demeurer un petit Génie adulé.
1 novembre 2015

Un arbre: un noyer

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Je suis un arbre par René STEPAN

Je suis un noyer. Je vis dans le Vercors, à Noyers d’ailleurs. L’homme qui garde des bêtes près du ruisseau a dû me planter il y a bien longtemps. C’est peut-être son père qui l’a fait, ou son grand-père. Cet homme vient souvent profiter de l’ombre de mon feuillage, réputée froide et dangereuse. Il s’y allonge après son repas fait de figues sèches est de pain. Ses repas, il les arrose avec de l’eau du puits.

Le but de mon existence est de servir à quelque chose : je suis là pour ça.

Outre le fait d’être un bel arbre majestueux, je suis célèbre dans la contrée car mes noix sont réputées. Elles fournissent de l’huile, et agrémentent aussi les salades.

Les rats et les loirs se gavent de mes fruits et l’on trouve souvent des coquilles vides à mes pieds.

Mon feuillage, de  grandes feuilles vertes sert à décorer le fond des paniers où la femme du berger met ses œufs et ses fromages, des Saint-marcellin, le fromage local.

Mes rameaux pendent dans le vide. J’ ai bien peur que l’homme ne les coupe.

Je sers aussi à héberger des oiseaux de toutes sortes. La force de mes branches permet aux gros passereaux de s’y reposer. Je crains les chasseurs qui les tirent.

Je suis heureux dans mon champ. Je me sens utile…

Aujourd’hui, l’homme et sa femme se sont étendus dans mon ombre. Qu’allez-vous penser ?  Ils pique-niquent.

Mais soudain, l’homme, après son repas s’approche avec une tronçonneuse bruyante et me mutile ; Aïe !!!...

Un engin arrive, me charge brutalement sur un gros camion, et me voilà parti en voyage.

Arrivé à un endroit empli de bruit, je suis débité en planches. Les meilleures et les plus belles termineront assemblées.

Que vont-ils faire de moi ? Un lit, une armoire ? Non ! on me met des pieds assez longs. Je mesure maintenant deux mètres de planches. Je suis assez beau, lavé, nettoyé, brossé etregardé tous les jours . Transporté dans une maison, des gens posent sur moi des victuailles, des verres, et sourient, tout en discutant. J’écoute leurs paroles…

 J’aurais pu finir ma vie dans leur cheminée pour les réchauffer.

Je sers de nouveau à quelque chose et continue à être heureux…

J’espère être un jour le témoin d’épousailles avec autour de moi des gens heureux, puis, pourquoi pas, d’héberger ensuite des bambins, égayant de leurs rires et de leurs jeux mes beaux jours retrouvés.

Mon avenir est assuré……

 

1 novembre 2015

Un petit forgeron par René Stépan

LE PETIT FORGERON DONT ON PARLE  ENCORE

Mon nom est François. Je suis forgeron à Lavelanet dans les monts d’Holmes

Mon maître s’appelle Bélibaste. Amoureux du catharisme, il est « Parfait » Il appelle les gens »mon bon homme » ou « ma bonne dame » et ne mange jamais de viande. Il me parle souvent des évènements qui se passent au Royaume de France où des protestants sont persécutés. Je ne perds pas une seule de ses paroles.

 J’ai bientôt 14 ans. Ma famille vient d’un petit village, près de Montségur ; ce village  dont je porte le nom s’appelle Ravaillac ; j’y vis encore.

Mon enfance s’est déroulée sans encombre , loin des guerres de religion , des «épidémies de peste et de la famine.

Passant mes journées à gambader dans les collines ariègeoises j

e vivais là un bonheur sans faille et dans une totale insouciance ,  gardant le troupeau de chèvres familial qui nous permettait de vivre chichement, mais pas pauvrement. Le fromage de nos chèvres, appelé Pérail, se vendait bien au marché de Foix où ma mère descendait le mardi pour les vendre, accompagnée de mon frère Louis.

 Je n’allais pas souvent à l’école ce qui explique que je ne sais pas lire.

Le dimanche, avec mes parents, nous allions au temple, à Lavelanet, assister à l’office pour y pratiquer notre culte. J’y écoutais le pasteur, un homme rigide dans ses propos, qui prêchait la bonne parole aux paysans ignorants et qui, relatait des faits inquiétants pour nous ,tels que la nuit de la Saint Barthélémy durant laquelle un de nos chefs , nommé Coligny, fut sauvagement assassiné.

C’est certainement lui qui m’a transmis ce en quoi je crois maintenant.

 

Beaucoup d’anciens, sur la place de Ravaillac, le soir, assis sur des bottes de paille, parlent encore du siège de Montségur. C’est vieux. Mais la foi reste. Comme eux, je suis protestant, huguenot  Mes parents , morts trop jeunes, terrassés par la Peste Noire, sont  enterrés dans le  jardin, sous une grande croix de bois régulière.

Souvent, je pense à ma formation, à Nîmes, à la maison des Compagnons. La « Mère » qui nous guidait était sévère mais juste. Elle m’a appris avec les autres compagnons les rudiments du métier : rigueur,  travail et perfection, comment forger sa lame venant de Cordoue, écouter les conseils des vieux forgerons de Laguiole, en Aubrac, qui tiennent leur science des maîtres de Thiers, capitale de la dague.

Aujourd’hui, j’ai terminé de forger la mienne. Métal rouge sur les braises, à coups de marteau, je pense être arrivé à la perfection du chef d’œuvre.

Cette dague, je l’ai cachée dans le pli de mon habit, au lieu de l’exposer et la vendre à la prochaine foire, tellement j’en suis fier. Mais je pense aussi qu’elle pourra me servir : contre les soldats intégristes espagnols nous ayant exterminés en Floride sous un prétexte futile, contre ces hordes de catholiques, les Dragons, qui n’acceptent que l’église romaine et la papauté qui se goinfre et contre ce jeune seigneur né à Pau, qui brigue le trône de France. Ne veut-il vendre Paris pour une messe. Peut-être me servirai-je de ma dague  en cette occasion ?

Les années passent et ma foi s’affirme. Un « vendu » est maintenant sur le trône.

J’ai économisé de l’argent sur ma maigre paye pour me rendre à Paris en diligence…

Un compagnon, huguenot lui aussi, m’héberge. Il sait ce que je viens faire dans la capitale. Nous avons ensemble de longues discussions sur notre religion  au cours d’interminables soirées. Sa femme et sa fille Eleonore, que j’aime en secret et à qui j’ai promis les épousailles, prennent souvent part à la conversation.

Après un an de mariage avec Eléonore, je suis toujours en quête de justice.

Je sais que le Roi adore se promener en carrosse dans le vieux Paris , non loin de la Cour des Miracles…

Je suis fin prêt….

Mai 1610, rue de la Ferronnerie ; il est midi, le temps est gris. Il a légèrement plu. Le carrosse royal, que j’attends depuis deux heures, tiré par de magnifiques chevaux blancs (les fameux chevaux blancs d’Henri IV), passent lentement dans la rue. A l’intérieur, le Roi, appelé aussi le vert galant, distribue des sourires et des  saluts royaux à la foule en admiration.

Cet Henri de Navarre, Henri IV maintenant, s’est converti à la religion catholique et a renié la sienne pour le trône. Lui que j’admirais dans ma région pour sa fidélité au protestantisme, est devenu à mes yeux un traître. J’ai décidé de faire justice.

A moi de faire jouer ma dague…

Lorsque le carrosse passe à ma hauteur, je bondis sur le marchepieds, regarde le roi, lui crie : «  A mort , sale traître ! » et lui plante ma dague en plein cœur. Il meurt sous le coup.

 

Arrêté, emprisonné, ma dague confisquée, je suis condamné à être écartelé en place de Grève. Mes os craquent, ma vie s’en va. Adieu ma jolie dague…

 

 

1610

 

 

 

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