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Atelier d'écriture de l'écoute-s'il-pleut
1 avril 2017

Une vie de chien

Liliane Fainsilber

 

No14-1960-rothko

Je m’appelle Hugues. Je suis un mâle de plus de quarante kilos. Mon maître qui m’aime beaucoup prétend que je suis de noble race, celle des dobermans. Il parait même que certains de mes ancêtres avaient accompagnés les soldats sous la mitraille.

 Mais moi je sais bien que mon maître exagère car ma mère qui était certes une authentique chienne doberman a été montée par un des chiens de berger du village dont le pedigree était plus qu’incertain. C‘est de lui que j’ai hérité mon poil plus long que celui de mes frères et  sœurs et aussi une tache blanche insolite sur ma robe d’un beau marron foncé.

Peu de temps après ma naissance, une fois sevré, mon maître qui était pompiste m’a adopté et surtout m’a dressé pour que je devienne un bon chien de garde. Il travaillait souvent de nuit et était heureux de m’avoir à ses côtés pendant ses longues heures de solitude.

 

Emile, mon maître, avait trois enfants et j’ai aussi été heureux avec eux. Nous faisions ensemble de grandes promenades, eux à vélo et moi courant auprès d’eux. Ils avaient construit une cabane au fond du jardin à côté de  laquelle poussait un arbre couvert de fruits, qu’entre eux, ils appelaient des kiwis. Je n’en ai jamais goûté, ce n’est pas une nourriture pour chien,  mais mon maître disait toujours qu’ils contenaient beaucoup de vitamine C. A l’abri de cet arbre les enfants se cachaient et m’entraînaient avec eux dans leur cachette. Ils y jouaient au papa et à  la maman mais je n’ai jamais compris quel rôle ils me faisaient jouer à moi.

 

 C’est ainsi qu’au fil des années,  nous avons tous vieillis ensemble. Les enfants sont partis. Emile a vendu son garage, puis un jour il est parti en maison de retraite. Comme on n’y accueillait pas les chiens, mon maître a essayé de me confier à des amis, mais le fait que je sois si imposant de taille et que j’ai la réputation en tant que doberman d’être agressif et éventuellement méchant, personne n’a voulu de moi.

 

Cela vous explique que je suis maintenant enfermé dans une cage à la SPA et que je m’y ennuie à mourir. Je dois être un peu trop vieux pour être adopté. J’ai en effet un peu plus de neuf ans et pour un chien c’est déjà vieux.  C’est ce que disent tous ceux qui viennent au refuge pour choisir l’un d’entre nous.

Si je pouvais parler je leur dirais  bien qu’avec moi ils seraient d’abord bien gardés et que surtout je leur donnerai beaucoup d’affection. Mais quand ils viennent me voir, je ne peux que remuer la queue pour attirer leur attention.

 

Mais je garde espoir, peut-être qu’un jour un petit garçon ou une petite fille seront irrésistiblement attirés par moi et insisteront tellement auprès de leur parents qu’ils accepteront de m’adopter. Je le mérite bien. Rappelez-vous de moi, ne m’oubliez pas, je suis Hugues, le doberman.

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  • L 'écoute-s'il-pleut est un moulin au bord d'une petite rivière qui fonctionne lorsqu'il pleut. Dans cet atelier,animé par Christelle Prévôt, nous attendons avec plaisir qu'il pleuve des mots en abondance, puisque ce sont eux qui alimentent nos textes.
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